Restitution de la chose louée – Avis des défauts

base giuridica

Nome del giudice

Ile Cour d'appel civil du canton de Fribourg [102 2015 211]

Data

06.01.2016

Sommario

Même si les locataires n’ont jamais contesté par la suite la tenue de l’état des lieux de sortie, auquel ils n’ont pas voulu participer « jusqu’au bout », le procès-verbal de sortie ne comportant pas leur signature ne vaut pas avis des défauts. Il incombe au bailleur d’établir la communication en temps utile d’un avis des défauts aux locataires et non à ces derniers d’alléguer que l’avis des défauts qui leur a été adressé était tardif.

Esposizione dei fatti

Les parties sont liées par un contrat de bail à loyer portant sur la location d’un appartement de 4,5 pièces. L’état des lieux d’entrée du 1er juin 2010, signé par les locataires, ne fait état d’aucune remarque particulière, hormis que l’appartement était « comme neuf » au moment de la remise des clés.
Le 26 septembre 2011, la bailleresse a résilié le bail à loyer des locataires pour le 30 mars 2012. L’état des lieux a été reporté à plusieurs reprises, les locataires souhaitant faire effectuer par une entreprise spécialisée des travaux de réparation et de nettoyage. Lors de l’état des lieux, la bailleresse a constaté que le nettoyage de l’appartement n’avait pas été fait et que de nombreux dégâts subsistaient. Elle allègue que la locataire, présente lors de l’état des lieux, avait quitté l’appartement avant la fin des contrôles et refusé de signer le procès-verbal d’état des lieux.
Le 20 septembre 2012, la bailleresse a saisi la Commission de conciliation en matière d’abus dans le secteur locatif du district de la Sarine, réclamant fr. 20'329.20 en dommages-intérêts.
Le 13 décembre 2012, les locataires ont ouvert action par-devant le Président du Tribunal des baux à loyers de l’arrondissement de la Sarine, concluant à ce que le solde du compte d’épargne garantie-loyer soit libéré en leur faveur et à ce que la bailleresse soit condamnée à leur verser la somme de fr. 1'500.- à titre de remboursement de frais accessoires indûment payés.
Le 14 janvier 2013, la bailleresse a déposé une demande en paiement par-devant le Tribunal des baux de l’arrondissement de la Sarine concluant à ce que les anciens locataires lui versent à titre de dommages-intérêts la somme de fr. 15'792.20.
Par jugement du 19 août 2015, le Tribunal des baux a admis la demande en paiement des locataires et rejeté la demande en paiement déposée par la bailleresse. Celle-ci a interjeté appel de cette décision en temps utile.

Considerazioni

3. …
b) En vertu de l’art. 267 al. 1 CO, le locataire doit restituer, à la fin du bail, la chose dans l’état qui résulte d’un usage conforme au contrat.
Il s’ensuit que le locataire doit tout d’abord assumer les travaux de nettoyage et les petites réparations au sens de l’art. 259 CO. Selon les circonstances, il doit ensuite régler les frais de remise en état des locaux à la suite d’une rénovation ou une modification qu’il a opérées sans l’accord du bailleur. Il incombe enfin au locataire de prendre en charge les dégâts qui excèdent l’usure normale de la chose; cet usage dépend de la destination des locaux et s’apprécie sur la base de tabelles déterminant la durée de vie moyenne des installations. Le locataire doit donc supporter les frais de réparation des locaux qui sont affectés d’un défaut dû à un usage anormal de la chose louée; si une réparation est impossible ou si les coûts en seraient disproportionnées, il faut allouer des dommages-intérêts correspondant à la dépréciation de la chose (arrêt TF 4C.261/2006 du 1er novembre 2006 consid. 3.1, publié in SJ 2007 l p. 365).
Selon l’art 267a al. 1 CO, le bailleur doit vérifier, lors de la restitution, l’état de la chose et aviser immédiatement le locataire des défauts dont celui-ci répond. Si le bailleur néglige de le faire, le locataire est déchargé de toute responsabilité, à moins qu’il ne s’agisse de défauts qui ne pouvaient pas être découverts à l’aide des vérifications usuelles (al. 2). Si le bailleur découvre plus tard des défauts de ce genre, il doit les signaler immédiatement au locataire (al. 3). En ce qui concerne le fardeau de la preuve, il incombe au bailleur, en tant que partie demanderesse (art. 8 CC), de prouver l’existence d’un défaut excédant l’usure normale, l’inexistence de ce défaut lors de l’entrée en jouissance, le dommage qui en résulte pour lui et la communication en temps utile d’un avis du défaut (arrêt TF 4C.261/2006 consid. 3.1, déjà cité; arrêt TF 4C.131/1995 du 15 novembre 1995 consid. 2 in fine, publié in SJ 1996 p. 322 ; CR CO l-LACHAT, art. 267 CO, n° 6). L’appelante ne le conteste d’ailleurs pas.
Si l’état des lieux établi contradictoirement est signé par le locataire sur place, il vaut avis des défauts. La question se pose lorsque le locataire ne signe pas le procès-verbal ou n’est pas présent lors de la vérification des locaux par le bailleur. Comme exposé plus haut, conformément à l’art. 8 CC, il incombe au bailleur de prouver que l’avis des défauts a été donné en temps utile; il lui appartient aussi d’établir à quel moment il a eu connaissance des défauts, à qui et comment il les à signalés. C’est la date de notification de l’avis qui compte, non celle de la réception effective par le locataire. La doctrine retient entre deux et trois jours ouvrables, maximum une semaine; ainsi, il a été jugé qu’un avis de défauts donné 27 jours après la remise des locaux était tardif; idem un avis donné trois semaines, respectivement un mois, après la remise des locaux (CPRA BAIL-AUBERT, 2010, art. 267a, n. 17 et réf. citées).

c) En l’espèce, l’appelante procède à une lecture erronée des dispositions qu’elle invoque, singulièrement de l’art. 247 al. 2 let. b ch. 1 CPC concernant la maxime inquisitoire sociale et de l’art. 8 CC concernant le fardeau de la preuve. S’il est vrai que la maxime inquisitoire sociale ne vise en principe pas à suppléer les carences d’une partie assistée d’un avocat, mais a essentiellement pour vocation de pallier à celles de la partie réputée la plus faible, a fortiori lorsque celle-ci ne s’est pas attachée les services d’un mandataire professionnel, il n’en demeure pas moins que cette maxime ne prive pas le juge de la possibilité de se fonder sur tous les faits pertinents et établis, même si les parties ne les ont pas invoquée (ATF 107 II 233 consid. 2b, JdT 1981 l 285). Dans le cas présent, s’il est exact que les locataires n’ont jamais expressément contesté la tenue d’un état des lieux de sortie, pas plus qu’ils n’ont invoqué la tardiveté de l’avis des défauts du 16 mai 2012, cet état de fait ressort indubitablement du dossier, en particulier des allégués de la bailleresse elle-même. Pour mémoire, l’appelante a elle-même admis que l’état des lieux de sortie du 31 mars 2012 a été réalisé en l’absence des locataires qui n’ont, selon ses propres termes, pas « voulu [y] jusqu’au bout ». Même si elle tente vainement de donner de la consistance à sa thèse en alléguant que les locataires n’ont jamais contesté par la suite la tenue de cet état des lieux de sortie, toujours est-il que le procès-verbal de sortie litigieux ne comporte pas leur signature, de sorte qu’il ne vaut pas avis de défauts en définitive, conformément à la doctrine et à la jurisprudence rappelées plus haut. Sous cet angle déjà, l’argumentation de l’appelante paraît douteuse, de sorte que son grief tiré de la violation de l’art. 247 al. 2 let. b ch. 1 CPC apparaît mal fondé. Quoi qu’il en soit, l’appelante perd de vue qu’il lui incombait d’établir la communication en temps utile d’un avis des défauts aux locataires et non pas à ces derniers d’alléguer que l’avis des défauts qui leur a été adressé était tardif. Or, d’une manière qui ne prête pas le flanc à la critique, le Tribunal des baux a constaté que la bailleresse a échoué dans cette preuve. En effet, même à admettre, avec l’appelante, que la lettre du 16 mai 2012 vaut avis des défauts, celui-ci est manifestement tardif, dès lors qu’il a été adressé aux locataires près de 50 jours après la remise effective des locaux.
Egalement mal fondé, le second grief de l’appelante doit être rejeté.

Decisione

57/5 - Restitution de la chose louée – Avis des défauts

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