Responsabilité précontractuelle – Nullité de contrat

base giuridica

Nome del giudice

Chambre d'appel en matière de baux et loyers de Genève

Data

11.09.2006

Sommario

La responsabilité précontractuelle est définie par l’obligation d’une partie de réparer le préjudice qu’elle a causé à l’autre par la violation de ses devoirs précontractuels. Il n’appartient pas au bailleur d’avertir les locataires de toutes les difficultés qu’ils pourraient rencontrer dans le cadre de l’activité de restauration qu’ils souhaitaient déployer dans les locaux, dès lors qu’il a affaire à des professionnels du domaine.

Esposizione dei fatti

Par acte déposé le 21 octobre 2005, les locataires appellent du jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 6 septembre 2005, les déboutant de toutes leurs conclusions. A l’appui de celles-ci, les appelants exposent que le Tribunal des baux et loyers a retenu à tort la validité du contrat de bail, celui-ci devant être qualifié de nul en raison de l’impossibilité de l’objet dudit contrat, les locaux loués ne pouvant pour des raisons administratives être affectés à la destination souhaitée par les locataires et connue du bailleur.
Le 18 août 1998, les parties ont conclu un contrat de bail à loyer portant sur la location de locaux commerciaux d’une surface de 300 m2 situés à C. et destinés à l’exploitation d’une buvette, avec soirées dansantes. Les locataires savaient que les locaux étaient situés en zone industrielle. Le propriétaire connaissait les activités que les locataires souhaitaient développer ; il n’a néanmoins fourni aucune garantie quant à l’obtention d’une autorisation d’exploitation, compte tenu de la zone dans laquelle sont situés les locaux.
Immédiatement après la prise de possession des locaux, les locataires ont entrepris des travaux de démolition et de transformation. Au mois de novembre 1998, les locataires ont cessé de s’acquitter du loyer. Cette décision était motivée par le fait qu’ils avaient appris que les locaux étaient situés en zone industrielle et qu’en conséquence ils ne pourraient pas obtenir l’autorisation d’y exploiter un café-restaurant.
Le 9 juin 1999, le bailleur a mis en demeure les locataires de régler les arriérés de loyer de novembre 1998 à juin 1999. Les locataires ont contesté l’existence de tout loyer, en raison de la nullité prétendue du contrat.

Considerazioni

2. Les appelants soutiennent en premier lieu que le contrat est nul en application de l’art. 20 CO.
Le contrat est nul s’il a pour objet une chose impossible, illicite ou contraire aux mœurs (art. 20 al. 1 CO).
L’impossibilité de l’objet du contrat doit être admise lorsqu’elle existe au moment de la conclusion du contrat (impossibilité initiale) et présente un caractère objectif et durable. Le caractère objectif implique que la prestation n’est pas possible quel que soit le débiteur, sur la base des faits ou du droit (CR CO I-Olivier GUILLOD/Gabrielle STEFFEN, art. 19-20 CO N 76).
Le bail à loyer est un contrat par lequel le bailleur s’oblige à céder l’usage d’une chose au locataire, moyennant un loyer (art. 253 CO).
D’emblée, il sied de constater, comme l’a relevé le Tribunal des baux et loyers, que l’objet du contrat, soit la mise de locaux à disposition des locataires n’est pas, en soi, impossible. C’est plutôt l’usage auquel étaient destinés les locaux qui n’est pas envisageable en raison de dispositions légales administratives.
La Cour rappellera en outre que dans un cas similaire, elle avait retenu que le type de contrat conclu n’était pas absolument impossible au sens de l’art. 20 CO, mais inexécutable intuitu personae, compte tenu à la fois de la réglementation en vigueur relativement à la situation de l’immeuble (dans une zone industrielle, supposant dérogation à accorder par une première autorité) et aux qualifications requises (impliquant une autorisation d’exploiter à accorder par une seconde autorité) (ACJ n° 812 du 18.06.2004 A. c/ S.).
En particulier, le fait que le contrat de bail mentionne le terme « Cercle brésilien » ne constitue aucunement l’objet du contrat et n’en fait pas partie. Comme rappelé ci-dessus, l’objet du contrat ou la prestation de la partie bailleresse se limite à la mise à disposition de l’usage d’une chose. Le « Cercle brésilien » n’est que la destination des locaux. Le fait que la destination de l’objet ne se révèle pas possible en raison de dispositions légales administratives cantonales n’en rend pas l’objet impossible.
C’est donc à juste titre que le Tribunal des baux et loyers a considéré que le contrat de bail entre les parties n’était pas nul au sens de l’art. 20 CO.

3. En matière de responsabilité précontractuelle ou culpa in contrahendo, plusieurs théories s’opposent quant à sa définition exacte. Il peut toutefois être retenu qu’il s’agit d’une responsabilité générale résultant de la violation de devoirs existants avant et hors de tout contrat (CR CO I-Luc THEVENOZ, art. 97-109 CO N 19).
La responsabilité précontractuelle est également définie par l’obligation d’une partie de réparer le préjudice qu’elle a causé à l’autre par la violation de ses devoirs précontractuels. Elle est subordonnée à l’existence d’une faute (GAUCH/- SCHLUEP/TERCIER, partie générale du droit des obligations, I, p. 129).
Nul ne peut invoquer sa bonne foi, si elle est incompatible avec l’attention que les circonstances permettaient d’exiger de lui (art. 3 al. 2 CC).
In casu, les locataires ont engagé des frais à concurrence de 59'500 fr. suite aux travaux entrepris dans les locaux. Ils ont également acquitté une facture d’énergie de 674 fr. 35, mais le Tribunal des baux a rejeté cette prétention en raison de l’absence de faute du bailleur.
L’admission de la validité du contrat ne saurait exclure une éventuelle responsabilité précontractuelle. La Cour constate cependant que les appelants savaient avant la conclusion du contrat que les locaux visés se trouvaient dans une zone industrielle. Professionnels dans le domaine de la restauration, ils savaient par conséquent qu’une dérogation serait indispensable pour obtenir l’autorisation d’exploiter l’établissement qu’ils souhaitaient ouvrir. A tout le moins, eu égard à la zone dans laquelle se trouvent les locaux, il leur appartenait de s’informer et de s’entourer de toutes les garanties concernant l’autorisation d’exploiter avant de signer le bail.
En effet, le bailleur pour sa part ne leur a nullement promis qu’ils obtiendraient les autorisations ou dérogations nécessaires à l’exploitation du « Cercle brésilien ». Il s’est contenté d’indiquer que d’autres établissements déployant le même genre d’activité étaient situés dans le même quartier.
Comme l’a relevé la Cour dans un cas similaire : « compte tenu de l’activité à déployer (exploitation d’un débit de boisson à Genève), il est et était notoire que des précautions devaient être prises par la future exploitante » (ACJ n° 812 du 18.06.2004 A. c/ S.).
Il n’appartient en effet pas au bailleur d’avertir les locataires de toutes les difficultés qu’ils pourraient rencontrer dans le cadre de l’activité de restauration qu’ils souhaitaient déployer dans les locaux, dès lors qu’il a affaire à des professionnels du domaine. De surcroît, il savait également que les locataires avaient connaissance de la zone dans laquelle étaient situés les locaux.
Aucune faute ne saurait donc être imputée au bailleur. Comme l’a retenu à juste titre le Tribunal des baux et loyers, c’ est bel et bien aux locataires à qui il peut être reproché une faute.
A l’instar du Tribunal des baux et loyers, la Cour relève que compte tenu des devoirs qui leur incombaient, ils ne sauraient se prévaloir de leur bonne foi, laquelle est incompatible avec ce que l’on était en droit d’attendre d’eux au regard de l’ensemble des circonstances, y compris de leur situation personnelle.
Aucune prétention en dommages-intérêts ne saurait donc être allouée aux appelants.

Decisione

42/1 - Responsabilité précontractuelle – Nullité de contrat

Ritorno