Reconduction tacite d’un bail à loyer résilié

base giuridica

Nome del giudice

Chambre d’appel en matière de baux et loyers de Genève

Data

18.06.2004

Sommario

La présomption légale de reconduction tacite n’est pas applicable à un bail dénoncé. Seule une présomption naturelle peut plaider en faveur d’une reconduction tacite d’un bail résilié. La fixation d’une limite temporelle appartient au législateur. Faisant œuvre de jurisprudence, le juge ne peut déterminer qu’un ordre de grandeur.

Esposizione dei fatti

Les parties ont conclu un contrat de bail à loyer pour la location d’un appartement de quatre pièces d’un immeuble sis au G. Le bail a été conclu le 11 juillet 1994 pour une durée de trois ans et 15 jours, renouvelable d’année en année. Il s’agit d’un logement HLM.
Au mois d’avril 1999, les locataires se sont séparés, un seul d'entre eux restant dans le logement. Le 5 octobre 1999, l'office cantonal du logement a informé la bailleresse que le départ d'un locataire mettait l'appartement en question en situation de sous-occupation au sens de la loi générale sur le logement et la protection des locataires (ci-après : LGL).
Par avis officiel du 20 novembre 2001, la bailleresse a résilié le contrat de bail pour le 31 décembre 2001. Dans le courrier accompagnant cet avis la locataire a été infor¬mée qu'en application de la LGL, elle disposait d'un délai d'une année à compter de la notification du congé pour libérer l'appartement. La locataire n'a pas contesté le congé notifié.
Par courrier du 22 octobre 2002, la bailleresse a fixé à la locataire un état des lieux de sortie en date du 7 janvier 2003. A cette date, la locataire a refusé de quitter l'appartement qu'elle occupe.
La bailleresse a saisi la Commission de conciliation en matière de baux et loyers d'une requête en évacuation le 26 février 2003.
Par acte déposé le 25 mars 2004, la locataire appelle du jugement rendu par le Tribu¬nal des Baux et loyers le 19 février 2004, la condamnant à évacuer immédiatement de sa personne et de ses biens l'appartement qu'elle occupe au G.

Considerazioni

En l’espèce, la locataire invoque la reconduction tacite du bail, car elle a occupé paisiblement son appartement pendant près de 10 mois après la notification du congé sans que le bailleur ne proteste.
Le bail à loyer peut être reconduit de manière expresse ou tacite. La reconduction est tacite, lorsque les parties manifestent, par des actes concluants, leur volonté de poursuivre le contrat. Tel est le cas lorsqu'après la fin du bail le locataire demeure dans les locaux, au su et sans protestation du bailleur, tout en continuant à s'acquitter du loyer (LACHAT, le bail à loyer, p. 399).
La présomption légale de reconduction tacite (art. 268a CO et 266 al. 2 CO) n'est pas applicable à un bail dénoncé. Seule une présomption naturelle peut, suivant les circonstances de l'espèce, plaider en faveur d'une reconduction du bail résilié. La conclusion tacite d'un bail ne peut être admise qu'avec prudence. La fixation d'une limite temporelle appartient au législateur. Faisant oeuvre de jurisprudence, le juge ne peut déterminer qu'un ordre de grandeur. En sus de la période pendant laquelle les parties au contrat font fi de la résiliation de bail et continuent à exécuter leurs obligations réciproques, l'existence d'un nouveau bail tacite dépendra, le cas échéant, d'autres éléments factuels. La jurisprudence genevoise consacrant un délai de 9 mois doit être relativisée (cf. notamment ACJ du 6.4.87 B. c/SI X.; ACJ no 306 du 6.12.91 R. c/ SA X.; ATF non publié du 28 mars 1995 D. c/ SI S.A. X.).
Selon la doctrine, on n'admettra pas la reconduction tacite du bail, quand le bailleur, qui a demandé au locataire de libérer les locaux, lui accorde seulement un sursis (LACHAT, le bail à loyer, p. 399).
Selon une disposition légale cantonale genevoise, en matière d'éva¬cuation de logements subventionnés, le locataire dispose, pour évacuer les locaux, d'un délai d'une année au plus à compter de la notification du congé par le bailleur. A l'échéance de ce délai, le bailleur est tenu, sur simple réquisition du service compétent, d'introduire à ses frais une procédure d'évacuation (art. 19 al. 1 et 2 du règlement d'exécution de la LGL).
L'appelante est certes restée sans protestation de la bailleresse dans son logement au-delà du seuil de 9 mois parfois retenu dans la jurisprudence pour admettre l'existence d'une reconduction tacite du bail. Néanmoins, la législation cantonale genevoise en matière de loyers subventionnés impose au bailleur d'octroyer un sursis d'une année au locataire avant de solliciter son évacuation. La locataire ne saurait donc tirer argument du fait qu'elle a pu continuer à demeurer dans son logement pendant cette durée.
Admettre la reconduction tacite de bail dans un tel cas reviendrait à rendre impossible toute évacuation de logements subventionnés en raison de sous-occupation.
L'appelante est d'autant plus mal venue de critiquer 1'inaction de l'intimée, car elle sait que cette inaction résulte uniquement de l'existence d'une norme légale cantonale à vocation sociale contraignant la bailleresse à accorder un sursis d'une année à la locataire pour libérer les locaux qu'elle occupe.
Cette norme a d'ailleurs justement pour but d'éviter au locataire de se retrouver dans une situation difficile consistant à devoir trouver un nouveau logement dans un laps de temps particulièrement court.
L'évacuation a été prononcée à bon droit et l'appel est mal fondé.

Decisione

40/5 - Reconduction tacite d’un bail à loyer résilié

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