Modification unilatérale des termes de résiliation du bail à loyer

base giuridica

Nome del giudice

Chambre d'appel en matière de baux et loyers de Genève

Data

12.03.2001

Sommario

La modification unilatérale des termes de résiliation constitue une autre prétention du bailleur au sens de l‘art. 269d al. 3 CO. Le bailleur peut avoir avantage à mettre en place des termes de résiliation longs ou courts selon l‘état du marché locatif. En période de pénurie, son avantage est d‘avoir des termes courts, alors que c‘est le contraire en période d‘excès de l‘offre locative. Ainsi, selon les circonstances, cette modification peut avoir un caractère abusif.

Esposizione dei fatti

Les parties sont liées par un contrat de bail du 15 septembre 1981 portant sur un appartement de six pièces à G. Le bail a été conclu pour une durée initiale de 3 ans, débutant le 1er janvier 1982; il est assorti d‘une clause de tacite reconduction d‘année en année.
A une date incertaine, qui peut être le 16 ou le 28 décembre 1998, la représentante de la bailleresse a adressé au locataire un avis de modification du contrat de bail entrant en vigueur le 1er avril 1999, selon lequel le délai de congé était porté de 3 à 4 mois et les échéances de bail fixées à chaque fin de mois, hormis le 31 décembre.
Le locataire a contesté la prétention du bailleur par requête déposée le 13 janvier 1999 auprès de la Commission de conciliation en matière de baux et loyers. Il faisait valoir d‘une part que la modification du bail permettrait au bailleur d‘augmenter le loyer onze fois par année et, d‘autre part, que l‘avis était tardif.
Non conciliée, l‘affaire a été portée devant le Tribunal des baux et loyers, lequel a rendu un jugement en date du 10 janvier 2000, par lequel il déboutait la bailleresse de ses conclusions.

Considerazioni

4.1 La modification des termes de congé constitue une autre prétention du bailleur au sens de l‘art. 269d alinéa 3 CO.
 Les autres prétentions du bailleur concernent toute modification unilatérale du contrat par le bailleur autre que le montant du loyer, et qui est "au détriment du locataire". Les modifications de ces autres prétentions du bailleur sont soumises aux conditions de l‘art. 269 al. 1 et 2 CO, selon une formulation quelque peu maladroite de la loi. Cela signifie qu‘elles peuvent intervenir pour le prochain terme de résiliation et qu‘elles doivent, sous peine de nullité, être notifiées à l‘aide d‘un avis officiel. Il s‘agit pratiquement de l‘avis de majoration auquel a été ajoutée une rubrique relative aux autres prétentions. La notification officielle implique la faculté de contrôle par l'autorité judiciaire du caractère licite ou abusif de la prétention.

4.2 Contrairement à ce qui prévaut en matière d‘adaptation du loyer, le législateur ne fournit aucun critère pour déterminer le caractère abusif ou non abusif d‘une autre prétention du bailleur (Lachat, Le bail à loyer, 1997, p. 372; Higi, Commentaire zurichois, ad art. 269d, p. 446, no 175).
Bien que la doctrine n‘insiste guère sur ce point, il y a lieu de poser le principe de la fidélité aux termes du contrat. Les règles relatives à l‘adaptation du loyer n‘y dérogent pas, dans la mesure où leur but consiste à maintenir le rendement suffisant et non abusif du bailleur dans le temps, par une adaptation à l‘évolution économique. Par identité de motif, les autres prétentions du bailleur ne doivent pas être acceptables lorsqu‘elles sont motivées par le seul bon vouloir du bailleur. Pour qu‘elles puissent être valables, il faut au moins qu‘elles reposent sur des raisons objectivement justifiables.
On ne saurait suivre l‘opinion exprimée dans le SVIT – Kommentar Mietrecht II (Zürich 1998, p. 711, no 60 et 61), selon laquelle il y aurait lieu de sérier les modifications du bail qui entrent dans le domaine d‘application de l‘art. 269 al. 3 CO des autres; rien dans la loi ne fonde une telle approche, laquelle confond le domaine d‘application et la licéité de la modification. Weber/Zihlmann pour leur part constatent à juste titre qu‘il ne suffit pas, pour admettre une modification unilatérale du loyer, de répercuter la diminution de jouissance sur le loyer (Commentaire bâlois, 1996, p. 1536 ss).
Higi, pour sa part, estime que la modification est admissible lorsqu‘elle peut se justifier par des motifs raisonnables et qu‘elle n‘entraîne pas une majoration de revenu du bailleur (Higi, Commentaire zurichois, p. 176). Ce point de vue est cependant trop limité. Une prétention qui peut, le cas échéant, avoir des motifs raisonnables, n‘en demeure pas moins abusive si elle équivaut à modifier en tous cas les parties essentielles du contrat. Dans un tel cas, la prétention est abusive, le bailleur n‘ayant d‘autre choix que de résilier le bail (SVIT – Kommentar, p. 711, Weber/Zihlmann, op. cit., p. 1537, no 11).
La position de Lachat, au terme de laquelle le juge devra procéder à une pesée des intérêts du bailleur et du locataire, apparaît judicieuse, pour autant qu‘elle ne soit pas limitée aux prétentions qui ne sont pas appréciables économiquement (Lachat, op. cit. p. 372, no 3.6).

5.1 Il y a lieu de déterminer si la modification unilatérale des termes de résiliation constitue une autre prétention du bailleur au sens de l‘art. 269d al. 3 CO. En soi, cette mesure n‘entraîne aucune diminution de jouissance de la part du locataire, ni n‘entraîne une augmentation du revenu du bailleur. Un arrêt de 1994 (ATF 106 IV 70) a ainsi mis en doute que ce type de modification du contrat soit au détriment du locataire (Lachat, op. cit., p. 371 note 25). Ce point de vue ne peut être approuvé. Certes, dans la mesure où les modifications des termes sont valables aussi bien pour le bailleur que pour le locataire, on pourrait considérer que la mesure est neutre. Telle n‘est cependant pas la réalité. Le bailleur peut avoir avantage à mettre en place des termes de résiliation longs ou courts selon l‘état du marché locatif. En période de pénurie, son avantage est d‘avoir des termes courts, alors que c‘est le contraire en période d‘excès de l‘offre locative. En principe, l‘intérêt du locataire est exactement inverse. Même si l‘on ne peut affirmer, dans l‘abstrait, qu‘une modification des termes de résiliation est toujours au détriment du locataire, on doit admettre que tel est le cas en l‘espèce, compte tenu de la pénurie de logements.

5.2 Dans le cas présentement soumis à la Cour, le raccourcissement des termes de bail intervient dans une situation de pénurie. Le bailleur en retire une plus grande souplesse aussi bien pour résilier le bail que pour en modifier les conditions. Pour le locataire, il y a une certaine diminution, pas très importante il est vrai, de sa sécurité quant à la durée de son bail. Certes, le locataire dispose en principe aussi de la faculté plus fréquente de demander une baisse de loyer, ce qu‘il fait notoirement de manière beaucoup moins systématique que le bailleur. En regard du désavantage encouru par le locataire, il y a lieu d‘examiner si les motifs invoqués par le bailleur sont raisonnables et l‘emportent sur l‘intérêt du locataire au maintien du statu quo.

5.3 Le bailleur soutient que la modification qu‘il souhaite apporter au bail résulte d‘un souci de souplesse et d‘uniformisation, dans la mesure où plusieurs autres locataires ont déjà des baux résiliables chaque mois de l‘année, sauf le 31 décembre. Il n‘est nullement expliqué en quoi consiste la souplesse invoquée. Logiquement, celle-ci réside dans la faculté de pouvoir résilier le bail ou l‘adapter plus rapidement. Au regard des développements qui précèdent, le but vise aussi à modifier l‘économie du contrat à l‘avantage du bailleur, sans qu‘une raison objective ne l‘impose.
Quant à l‘uniformisation des baux dans l‘immeuble, le bailleur ne démontre nullement en quoi elle constituerait une raison objective justifiant d‘imposer au locataire le désavantage, même léger, de la modification des termes de résiliation telle qu‘elle est requise. La modification du bail à laquelle prétend le propriétaire est ainsi, au mieux, de pure convenance. Elle doit dès lors être considérée comme abusive. Le jugement querellé sera confirmé, par substitution de motifs.

Decisione

35/7 - Modification unilatérale des termes de résiliation du bail à loyer

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