Modification du bail à loyer - Nullité

base giuridica

Nome del giudice

Chambre d’appel en matière de baux et loyers de Genève

Data

12.06.2006

Sommario

La notification d’une modification du bail à loyer doit répondre à des critères de clarté et de précision. L’obligation pour le locataire de se référer aux pièces du dossier ne lui permet pas de se rendre compte de la portée précise de la modification et de décider en toute connaissance de cause de l’opportunité de la contester ou non. Une telle formulation n’est donc pas compatible avec les exigences impératives de clarté que doit revêtir la formule de notification selon les réquisitions de l’art. 269 d CO et de la jurisprudence qui s’en est dégagée.

Esposizione dei fatti

Par acte du 19 août 2005, la locataire appelle du jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 15 juin 2005 constatant la validité de la hausse de loyer notifiée par la propriétaire. L’appelante conclut à l’annulation dudit jugement, à la constatation de la nullité de l’avis de modification du bail du 22 avril 2002.
Les parties sont liées par un contrat de bail portant sur la location d’un appartement de trois pièces dans un immeuble à G.
Par avis officiel de majoration de loyer du 22 avril 2002, la bailleresse a fait part à l’appelante que le loyer restait inchangé, de même que les provisions pour les charges de chauffage ; l’avis indiquait en dessous, en caractères gras : « A l’échéance du bail, celui-ci se renouvellera de 5 ans en 5 ans, avec indexation à l’intégralité de l’ISPC (art. 17, al. 1 OBLF).
Par avis du 11 octobre 2004, la bailleresse a notifié à la locataire un avis de majoration de loyer destiné à porter celui-ci à fr. 7'284.– à compter du ler décembre 2004. Il était indiqué : « augmentation conforme aux art. 269b CO et 17 OBLF. Application de la clause d’indexation de votre bail. Ancien indice : 149.0. Nouvel indice : 151.7 ».
Par requête en contestation de hausse de loyer et en constatation de la nullité d’une modification de bail, envoyée le 2 novembre à la Commission de conciliation en matière de baux et loyer, la locataire déclarait faire opposition à l’avis de majoration du 11 octobre 2004, indiquant que l’avis du 22 avril 2002 lui avait été totalement incompréhensible.

Considerazioni

3. L’appelante fait grief aux premiers juges d’avoir commis une violation de l’art. 269d al. 2 et al. 3 CO dans la mesure où, s’agissant d’une modification du bail, ses motifs doivent être indiqués à peine de nullité. Elle se plaint en outre que la rédaction de la modification elle-même n’était ni claire, ni compréhensible et partant non valable.

3.1. L’art. 269d CO dispose que le bailleur peut en tout temps majorer le loyer pour le prochain terme de résiliation. L’avis de majoration du loyer, avec indication des motifs, doit parvenir au locataire dix jours au moins avant le début du délai de résiliation et être effectué au moyen d’une formule agréée par le canton (al. 1).
Les majorations de loyer sont nulles lorsque :
a) elles ne sont pas notifiées au moyen de la formule officielle;
b) les motifs ne sont pas indiqués ;
c) elles sont assorties d’une résiliation ou d’une menace de résiliation (al. 2).
Les premier et deuxième alinéas sont aussi applicables lorsque le bailleur envisage d’apporter unilatéralement au contrat d’autres modifications au détriment du locataire, par exemple en diminuant ses prestations ou en introduisant de nouveaux frais accessoires (al. 3).

3.2. En la présente occurrence, la bailleresse a fait parvenir à la locataire, en date du 22 avril 2002, l’avis litigieux sur la formule officielle en vigueur dans le canton de Genève pour la majoration de loyer ou d’autres modifications du bail. La formulation adoptée était en bref la suivante :
- le loyer annuel de 7'152 fr. était inchangé ;
- sous la rubrique B visant l’application de l’art. 269d al. 3 CO, aucune inscription n’était portée si ce n’est le maintien des charges au montant annuel de 1'140 fr. ;
- en dessous de l’indication : motifs précis de la majoration ou des modifications ci-dessus, il était porté en caractères gras :
« A l’échéance du bail, celui-ci se renouvellera de 5 ans en 5 ans, avec indexation à l’intégralité de l’ISPC (art. 17, al. 1 OBLF) » ;
suivaient en dessous la date et la signature du mandataire de la bailleresse.
Cette rédaction n’est certes pas exemplaire au regard des normes applicables, en particulier de l’articulation de la formule officielle approuvée par arrêté du Conseil d’Etat, dans la mesure où la modification du bail doit être indiquée par le bailleur au chapitre B ; n’ayant pas suivi ce modus, l’écrit est à tout le moins contradictoire ; il ne revêt pas les exigences de clarté, requises à peine de nullité par la jurisprudence fédérale, à savoir :
« Selon la jurisprudence rendue en matière de motivation des hausses de loyer, qui doit donc s’appliquer à toutes les autres modifications unilatérales du contrat par le bailleur, les renseignements donnés par un autre moyen que la formule officielle peuvent préciser ou servir à l’interprétation des motifs mentionnés sur l’avis formel, mais non étendre ceux-ci ou remplacer une indication omise. Le droit du bail est un domaine juridique empreint de formalisme, dans lequel il convient de se montrer strict en matière de respect des prescriptions de forme ; il ne faut en principe pas admettre d’exception aux règles édictées dans l’intérêt du locataire (ATF 121 III 6, consid. 3a et les arrêts cités). Ainsi , lorsque les motifs ne sont pas mentionnés sur la formule officielle, mais sont indiqués uniquement dans une annexe ou dans une lettre d’accompagnement, la modification unilatérale du contrat est nulle (ATF 120 II 206, consid. 3b). Il en va de même lorsque le contenu de la communication figurant sur la formule officielle n’est pas suffisamment précis (ATF 121 III 6, consid. 3b). Si le sens et la portée de cette communication ne sont pas clairs, il y a lieu de l’interpréter comme toute manifestation de volonté du bailleur, selon le principe de la confiance. On examinera d’après les facultés de compréhension du locataire et au vu de toutes les circonstances du cas particulier, si les motifs donnés sont suffisamment clairs et précis, pour que l’intéressé puisse décider en toute connaissance de cause s’il veut s’opposer ou non aux nouvelles clauses contractuelles (ATF 121 III 6, consid. 3c ; ATF 121 III 466 ; ATF 121 III 460 = SJ 1966, p. 249, consid. 4a) cc) ».

3.3. Dans le cas particulier, la modification du contrat ne saute pas aux yeux puisque le chapitre prévu pour cette dernière ne contient aucune mention ; en particulier, l’art. 1 dudit chapitre B, réservé à la nouvelle échéance du bail proposée, avec reconduction éventuelle selon clause du bail, n’a pas été remplie, permettant de penser que l’échéance du bail n’était pas modifiée, selon le sens que le destinataire pouvait donner de bonne foi à la communication.
Certes, à l’emplacement des motifs précis, il était indiqué qu’à l’échéance du bail, celui-ci se renouvellera de 5 ans en 5 ans ; encore faut-il rechercher l’échéance du bail qui n’est pas précisée, par rapport à cette notification du 22 avril 2002 ; pour ce faire, le locataire avait à considérer que selon le procès-verbal de conciliation du 27 juin 1997, le bail se renouvelait, à partir de l’échéance du 30 septembre 2001, d’année en année, sauf congé donné trois mois d’avance ; au moment de la notification du 22 avril 2002, le locataire devait déduire que le contrat se renouvellera à l’échéance du 30 septembre 2002 pour une durée de cinq ans, soit jusqu’au 30 septembre 2007. Cette référence nécessaire aux pièces du dossier, ne permettait pas au destinataire de la communication du 22 avril 2002 de se rendre immédiatement compte de sa portée précise et de décider en toute connaissance de cause de l’opportunité de la contester ou non.
Cette formulation n’est donc pas compatible avec les exigences impératives de clarté que doit revêtir la formule de notification selon les réquisits de l’art. 269d CO et de la jurisprudence qui s’en est dégagée.

3.4. Cette conclusion s’impose encore au regard de la mention introduite au chapitre A de la formule qui a trait au loyer annuel indiqué comme inchangé, alors que le bailleur vise précisément l’introduction d’une clause d’indexation du loyer. Ce libellé contradictoire est de nature à conduire le destinataire à ne pas lui donner l’importance qu’il mérite quant à la modification qu’il vise à introduire sur les réadaptations (futures) dudit loyer, qui est annoncé comme inchangé.
En outre, l’absence de toute motivation contrevient également aux exigences dégagées par la jurisprudence quant aux conditions de validité de l’avis de hausse de loyer ou d’autres prétentions du bailleur qui, à peine de nullité, doit être motivé ; dans le cas d’espèce, la motivation était d’autant plus indispensable qu’elle aurait, cas échéant, permis au destinataire de se rendre compte de la portée précise de la communication dont les insuffisances ont été relevées ci avant.
C’est le lieu de souligner que l’art. 269d CO offre au bailleur d’obtenir la modification du contrat contre la volonté du locataire (ATF n° 4C.289/1995, consid. 3.a). Il en découle que les exigences de clarté et de motivation doivent être scrupuleusement suivies, de façon que l’avis soit opposable à son destinataire, selon le sens que le locataire peut lui attribuer de bonne foi ; à ce défaut, la communication est nulle et ne peut déployer un quelconque effet juridique.

Decisione

42/7 - Modification du bail à loyer - Nullité

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