Evacuation forcée - mesures de contrainte

base giuridica

Nome del giudice

Arrêt de la chambre d’appel en matière de baux et loyers de Genève

Data

20.02.2012

Sommario

Lorsqu’aucune mesure de contrainte indirecte n’a été ordonnée, et lorsque le créancier n’a aucun intérêt à obtenir une évacuation rapide, le locataire s’acquittant ponctuellement des indemnités pour occupation illicite des locaux, le Tribunal des baux et loyers n’a pas fait une application proportionnée et correcte de l’art. 343 CPC, en ordonnant d’emblée l’évacuation des occupants du logement par la force publique, avec un délai de quatre mois.

Esposizione dei fatti

Par requête du 11 août 2011, la bailleresse a sollicité du Tribunal des baux et loyers l’exécution forcée du jugement prononcé par ledit Tribunal le 8 mars 2011, condamnant les locataires à évacuer immédiatement l’appartement qu’ils occupent dans un immeuble à G., conformément à l’art. 257 d CO.
 Lors de l’audience du 11 octobre 2011, la bailleresse a précisé que l’arriéré du loyer avait été réglé au mois de mai 2011 et que les locataires s’acquittaient depuis lors régulièrement des indemnités pour occupation illicite des locaux. Elle a précisé cependant qu’il s’agissait de la troisième résiliation de bail pour défaut de paiement depuis 2003.
 Par jugement du 14 octobre 2011, le Tribunal des baux et loyers a sursis à l’exécution par la force publique du jugement rendu le 8 mars 2011 pendant une période de quatre mois à compter de l’entrée en force de son jugement et a autorisé la bailleresse à faire exécuter par la force publique le jugement à l’expiration du délai mentionné ci-dessus. Par acte du 28 octobre 2011, les locataires ont fait recours contre ledit jugement.

Considerazioni

3. Il convient d’entrer en matière sur les griefs adressés par le recourant à l’encontre du jugement entrepris.

3.1. Selon l’art. 320 CPC, le recours est recevable pour violation du droit ou constatation manifestement inexacte des faits.
Par ailleurs, selon l’art. 341 al. 3 CPC, sur le fond, la partie succombante peut uniquement alléguer que des faits s’opposant à l’exécution de la décision se sont produits après la notification de celle-ci, par exemple l’extinction, le sursis, la prescription ou la péremption de la prestation due.

3.2. A cet égard, le recourant fait valoir qu’il a rattrapé, postérieurement au jugement ordonnant son évacuation, l’arriéré de loyer qui avait conduit à la résiliation du bail et qu’il s’acquittait ponctuellement des indemnités pour occupation illicite des locaux. Cette allégation, admise par l’intimée, doit être considérée comme établie.
Cela étant, cette situation, qui a été prise en compte par les premiers juges, ne rend pas caduque pour autant le jugement d’évacuation. En effet, l’obligation stipulée par ledit jugement n’a toujours pas été exécutée.

3.3. Dans un deuxième moyen, le recourant fait valoir que la mise à exécution du jugement d’évacuation frapperait de manière injuste et sans nécessité une famille s’acquittant désormais régulièrement du loyer et exposée, en raison d’une pénurie du logement notoire, à ne pas retrouver de logement vacant ou décent si l’exécution du jugement devait être prononcée.
Saisi d’une requête d’exécution, le Tribunal dispose, lorsque la décision prescrit une obligation de faire, de plusieurs modalités prévues par l’art. 343 al. 1 CPC.
Le Tribunal de l’exécution peut librement choisir quelles modalités il ordonne afin de permettre l’exécution de la décision concernée. La partie requérante peut évidemment suggérer une méthode d’exécution. Le Tribunal de l’exécution doit, pour sa part, faire en sorte qu’une décision judicaire déjà entrée en force soit exécutée dans les meilleurs délais (LUSCHER/HOFMANN, Le code de procédure civile, 2009 p. 211).
Toutefois, plusieurs auteurs s’accordent à reconnaître que les mesures de contrainte directe prévues par l’art. 343 al. 1 let. d et e CPC revêtent dans la règle un caractère subsidiaire.
Ainsi, le juge n’ordonnerait en principe l’exécution par la force publique que si la contrainte indirecte n’a pas produit d’effet ou semble d’emblée vouée à l’échec (HOHL, Procédure civile, Tome II, 2010 n. 3226 p. 573 ; JEANDIN Code de procédure civile commenté 2011 n. 15 ad. art. 343 CPC ; OBERHAMMER, Kurz Kommentar zur ZPO, 2010, n. 10 ad art. 343 LPC).
Le juge n’ordonnera l’exécution par contrainte directe que lorsque l’intérêt du créancier à une exécution rapide du jugement le nécessite (JEANDIN, op.cit. n. 15 ad. art. 343 CPC; SUTTERSOMM/ HASENBÖHLER/ LEUENBERGER, Kommentar zur ZPO, 2010, n. 11 ad art. 343 CPC).
La Cour de céans entend se rallier à ces opinions, ce d’autant plus qu’elles s’inscrivent dans la la ligne préconisée par le législateur cantonal qui a prévu en son art. 26 al. 4 LACC que le Tribunal pouvait, pour des motifs humanitaires, surseoir à l’exécution du jugement d’évacuation dans la mesure nécessaire pour permettre le relogement du locataire ou du fermier.

3.4. Dans le cas présent, aucune mesure de contrainte indirecte n’a encore été ordonnée.
Le créancier n’a aucun intérêt actuel à obtenir une évacuation rapide du logement dès lors que le recourant s’acquitte jusqu’à présent ponctuellement des indemnités pour occupation illicite des locaux.
Rien n’indique enfin qu’une mesure de contrainte indirecte puisse être inopérante.
Dans ces circonstances, en ordonnant d’emblée l’évacuation des occupants du logement par la force publique avec, pour seul atermoiement, un délai de quatre mois, le Tribunal des baux et loyers n’a pas fait une application proportionnée et correcte de l’art. 343 CPC.
Sa décision sera donc annulée concernant le recourant.
La Cour, statuant à nouveau sur ce point comme l’art. 327 al. 3 let. b CPC l’y autorise, condamnera le recourant à exécuter le jugement à compter d’un délai de deux mois dès réception du présent arrêt.
A défaut d’exécution, il sera condamné à verser une amende d’ordre de 50 fr. par jour d’inexécution conformément à l’art. 343 al. 1 let. c CPC.
Il appartiendra à l’intimée, si elle s’y estime fondée, de déposer une nouvelle requête en exécution au cas où la susdite mesure s’avérerait inefficace (SUTTER-SOMM et alii, op. cit., n. 15 ad art. 343 CPC).

Decisione

52/10 - Evacuation forcée - mesures de contrainte

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