Contestation du loyer initial

base giuridica

Nome del giudice

Chambre d'appel en matière de baux et loyers du canton de Genève

Data

11.12.2009

Sommario

Le Tribunal fédéral a sanctionné la méthode consistant, pour le bailleur, à prévoir à titre de loyer initial un montant plus élevé que celui autorisé par l'autorité administrative, puis à provisoirement ''ramener'' celui-ci au niveau admis, pour la période de contrôle de trois ans. Les juges fédéraux ont relevé le caractère non anodin de ce procédé, dans la mesure où il permettrait au bailleur de majorer unilatéralement un loyer sans devoir se limiter aux critères relatifs du droit du bail.

Esposizione dei fatti

Les parties sont liées par un contrat du 16 décembre 2004 portant sur la location d'un appartement de trois pièces. Le loyer a été fixé à fr. 18'600.– annuellement, charges non comprises.
L'avis officiel de fixation du loyer initial mentionne que le loyer du précédent locataire s'élevait, sans les charges, à fr. 5'526.– annuellement, et motive la majoration par la référence aux loyers usuels dans le quartier, selon l'art. 269a CO. D'importants travaux de rénovation avaient été effectués dans l'appartement.
Le 13 janvier 2005, le locataire a saisi la juridiction des baux et loyers d'une contestation de loyer initial, concluant à un loyer annuel de
fr. 9'675.–. Le bailleur s'y est opposé.
Par décision du 27 février 2007, le Département des constructions et des technologies de l'information (DCTI) a soumis les travaux réalisés avant l'entrée du locataire à la loi sur les démolitions, transformation et rénovation de maisons d'habitation (LDTR), a autorisé rétroactivement ces travaux et a fixé le loyer annuel à fr. 7'369.– pour une durée de trois ans, dès le 16 décembre 2004.
Par jugement du 27 novembre 2008, le Tribunal des baux et loyers a fixé le loyer annuel à fr. 7'369.– du 16 décembre 2004 au 15 décembre 2007, puis à 12'000.– dès le 16 décembre 2007. Le locataire a interjeté appel de ce jugement.

Considerazioni

4.  L'appelant se plaint de la fixation du loyer à 12'000 fr. par an dès le 16 décembre 2007. Il estime en substance que le Tribunal n'avait pas à statuer à ce sujet, dès lors que le litige porte sur le montant du loyer initial d'un bail ayant débuté en décembre 2004. Il souligne en outre que l'intimé ne lui a notifié aucun avis de majoration pour le 16 décembre 2007, de sorte qu'aucune hausse ne saurait intervenir à cette date.
 La Cour de céans a déjà eu l'occasion de se déterminer sur le sort des loyers dépassant le maximum autorisé par l'Etat, en application de la LDTR ou de la législation relative à la zone de développement. Lorsque les parties fixent contractuellement un loyer supérieur à celui admis par l'administration compétente, le contrat renferme une disposition contraire à la loi et est frappé de nullité partielle en vertu de l'art. 20 CO. Le locataire dispose dès lors d'une créance en remboursement fondée sur l'enrichissement illégitime et portant sur la différence entre le montant autorisé et le montant perçu par le bailleur (ACJ n° 455 du 18 mars 1994, G.G. c/ P.S., consid. 4-6, et ACJ n° 259/96 du 25 mars 1996, consid. 3). Ces arrêts cantonaux font eux-mêmes référence à l'ATF 93 II 97, par lequel les juges fédéraux sont parvenus à la même conclusion dans le cas d'un fermage excédant celui autorisé par l'autorité compétente en matière de contrôle des fermages agricoles.
 Il ressort du jugement entrepris que le DCTI a fixé, par décision du 27 février 2007, le loyer annuel maximum du logement en cause à 7'369 fr., dès le 16 décembre 2004, en application de la LDTR, ce qui n'est plus contesté par l'intimé. Ce loyer étant inférieur au loyer effectivement perçu depuis le début du bail, le contrat de bail conclu entre les parties est frappé de nullité partielle. Au vu de la jurisprudence susmentionnée, le locataire dispose dès lors d'une créance en remboursement portant sur la différence entre le montant autorisé (7'369 fr. par an) et le loyer versé (18'600 fr. par an), dont il peut obtenir le paiement soit par le biais d'une action fondée sur l'enrichissement illégitime, soit par le biais d'une contestation du loyer initial.
 En l'espèce, l'appelant a contesté le loyer initial dans les trente jours à compter de la remise des clés du logement loué, concluant en dernier lieu à un loyer de 6'948 fr. par an (cf. conclusions motivées du 21 mai 2008, p. 13). Compte tenu de la décision administrative prise par le DCTI désormais entrée en force, les premiers juges ont arrêté le nouveau loyer à 7'369 fr. par an, ce qui n'est contesté par aucune des parties. Le Tribunal des baux et loyers a toutefois fait fausse route en arrêtant lui-même, sur des bases statistiques, un loyer valable à partir du 16 décembre 2007, soit trois ans après le début du bail. Une éventuelle augmentation du loyer postérieure à la période de contrôle de trois ans instituée par le DCTI n'est en effet envisageable que dans l'hypothèse où le bailleur notifie à la partie locataire une hausse de loyer, pour une échéance contractuelle et au moyen de la formule officielle (arrêt du 18 mars 2005 dans la cause 1P.20/2005, consid. 2.3.2; SJ 2005 I 485, 489-490, consid. 2.3.2). L'intimé n'ayant pas allégué avoir formellement sollicité cette majoration, que cela soit pour l'échéance contractuelle du 31 décembre 2007 ou pour une autre échéance, on ne voit pas comment il pourrait prétendre à un loyer supérieur à celui fixé par l'autorité administrative compétente.
 Il s'ajoute à cela que, dans l'arrêt précité du 18 mars 2005, le Tribunal fédéral a sanctionné la méthode consistant, pour le bailleur, à prévoir à titre de loyer initial un montant plus élevé que celui autorisé par l'autorité administrative puis à provisoirement « ramener » celui-ci au niveau admis, pour la période de contrôle de trois ans. Les juges fédéraux ont relevé le caractère non anodin de ce procédé, dans la mesure où il permettrait au bailleur de majorer unilatéralement un loyer sans devoir se limiter aux critères relatifs du droit du bail. Compte tenu notamment des objectifs poursuivis par la LDTR, une éventuelle majoration du loyer après la période de contrôle cantonal doit être basée sur le loyer fixé par le Département compétent, et non sur un autre montant; elle doit, de plus, respecter les règles du droit civil (consid. 2.3.2). Le jugement attaqué aurait pour conséquence d'aboutir à un résultat similaire, puisqu'il autoriserait une augmentation unilatérale du loyer à l'issue de la période de contrôle, sans justification fondée sur la méthode relative.
 Dans ce contexte, le jugement attaqué doit être partiellement annulé et le loyer initial fixé à 7'369 fr. par an, à compter du 16 décembre 2004. En l'absence d'avis de majoration intervenu en cours de bail, il n'y a pas lieu d'arrêter un quelconque loyer majoré pour une autre échéance.

Decisione

48/7 - Contestation du loyer initial

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