Contestation de hausse de loyer

base giuridica

Nome del giudice

Chambre d’appel en matière de baux et loyers du canton de Genève

Data

14.03.2011

Sommario

Les facteurs absolus ne peuvent pas être cumulés aves les facteurs relatifs. Prétendre que l’augmentation notifiée se justifie par l’indexation pour fr. 182.- et par les travaux réalisés dans l’immeuble et l’appartement, ainsi que la comparaison des loyers des appartements comparables loués dans l’immeuble et des loyers selon statistiques cantonales pour fr. 168.-, revient à invoquer tant l’adaptation aux loyers usuels que la hausse des coûts et des prestations supplémentaires du bailleur, ainsi que le maintien du pouvoir d’achat du capital exposé aux risques, soit des critères incompatibles entre eux.

Esposizione dei fatti

Les parties sont liées par un contrat de bail portant sur la location d’un appartement de 4,5 pièces. Le bail a pris effet le 1er novembre 1986, le loyer annuel s’élevant à fr. 7’620.-. Le loyer a été porté de fr. 9'000.- à fr. 12'000.-, charges non comprises, dès le 1er janvier 2009.
Par avis du 13 mai 2009, le loyer a été porté à fr. 13'200.-, charges non comprises, dès le 1er janvier 2010. L’annexe jointe à l’avis officiel contient les motifs de la majoration suivants :
• S’il y avait eu une indexation depuis le 1er janvier 1992, le loyer actuel serait de fr. 932.- (+ fr. 182.-).
• Des travaux importants de rénovation ont été effectués dans votre appartement pour fr. 9'990.- et dans l’immeuble pour fr. 410'600.-.
• Le loyer des derniers appartements loués dans l’immeuble correspond, pour un 4,5 pièces à fr. 2'100.-, charges non comprises.
• Selon les statistiques genevoises annuelles, le loyer d’un appartement de 4 pièces s’échelonne entre fr. 1'720.- (loyer avantageux), fr. 2'380.- (loyer moyen) et fr. 3'580.- (loyer cher).
L’avis de hausse de loyer du 13 mai 2009 a été retourné à la bailleresse avec la mention "non réclamé". Le 14 décembre 2009, la bailleresse a adressé aux locataires une copie de l’avis de hausse de loyer du 13 mai 2009, en leur indiquant qu’il déployait ses effets 30 jours après la fin du délai de garde.
Les locataires ont saisi le 21 décembre 2009 la Commission de conciliation en matière de baux et loyers d’une requête en constatation de la nullité de hausse de loyer. Par jugement du 22 septembre 2010, le Tribunal des baux et loyers a notamment constaté la nullité de l’avis de majoration du 13 mai 2009. La bailleresse a interjeté appel de ce jugement le 11 octobre 2010.

Considerazioni

2. La majoration du loyer d’un bail d’habitation ou de local commercial doit, sous peine de nullité, être notifiée au moyen d’une formule officielle, c’est-à-dire une formule agréée par le canton du lieu de situation de l’immeuble (art. 269d CO). Les motifs précis de la hausse ainsi que les montants correspondant à chaque motif invoqué doivent figurer sur la formule officielle (art. 19 al. 1 lit. a ch. 4 OBLF), ou sur une lettre annexe, à condition que la formule officielle s’y réfère expressément (art. 19 al. 1 bis OBLF).
L’utilisation d’une formule créée par le bailleur et dont le contenu satisfait aux exigences de l’art. 19 OBLF n’est admissible que si elle a été homologuée par l’autorité cantonale compétente (ATF 121 ΙΙΙ 214 JT 1996 Ι 38).
Les motifs de l’avis de majoration doivent être précis et permettre au locataire de saisir la portée et la justification de la majoration de manière à pouvoir apprécier en plein connaissance de cause l’opportunité ou non de la contester (ATF 121 ΙΙΙ 6). Le sens des motifs figurant dans l’avis s’interprète à la lumière du principe de la confiance, en d’autres termes la volonté du bailleur telle que peut la comprendre le locataire destinataire de bonne foi (ATF 118 ΙΙ 130 consid. 2b). Les conditions de forme particulièrement rigoureuses qui sont imposées au bailleur mettent le locataire en mesure de contester le loyer qui lui est annoncé et d’invoquer les règles édictées contre les loyers abusifs (TERCIER/FAVRE, Les contrats spéciaux, 4e éd., 2009, no 2637). Ces conditions de forme sont donc indissociables du système de protection contre les loyers abusifs (ATF 4A_177/2010 du 14 juin 2010, consid. 3).
La motivation indiquée dans l’avis de majoration constitue une manifestation de volonté du bailleur, soit un acte juridique unilatéral qui se manifeste sous la forme d’un droit formateur (GAUCH/SCHLUEP, Schweizerisches Obligationenrecht, vol. Ι, 5e éd., p. 24 ss n. 151 ss). La détermination de son sens et de sa portée s’effectue conformément aux principes généraux en matière d’interprétation des manifestations de volonté (KRAMER, Commentaire bernois, n. 50 ad art. 18 CO), ce qui vaut également pour l’exigence de clarté. Si les parties ne sont pas d’accord sur le sens à donner aux motifs figurant dans l’avis formel de majoration, il y a lieu d’interpréter ceux-ci selon le principe de la confiance. On examinera d’après les facultés de compréhension du locataire et au vu de toutes les circonstances du cas particulier si les motifs donnés sont suffisamment clairs et précis pour que l’intéressé puisse décider en toute connaissance de cause s’il veut s’opposer ou non aux nouvelles clauses contractuelles (ATF 121 ΙΙΙ 6 consid. 3 c). Lorsque le contenu des motifs n’est pas suffisamment clair et précis, renvoyant par exemple à des facteurs de hausse incompatibles entre eux, il est nul (ATF 121 ΙΙΙ 6).
Les critères de l’adaptation aux loyers usuels, de la hausse des coûts et des prestations supplémentaires du bailleur, ainsi que du maintien du pouvoir d’achat du capital exposé aux risques sont de prime abord incompatibles, de sorte qu’un avis de majoration qui les invoque ne peut être considéré comme suffisamment motivé (ATF 121 ΙΙΙ 6 consid. 3c). Une prétention du bailleur qui serait simultanément justifiée par plusieurs facteurs antinomiques est nulle. Les facteurs absolus ne peuvent pas être cumulés avec les facteurs relatifs. (LACHAT, le bail à loyer, Lausanne 2008, p. 544, ch. 6.3 et 6.4).
Le bailleur est lié par les motifs qu’il invoque (ATF 117 ΙΙ 452 consid. 5) et qui lui sont opposables en cas de contestation (ATF 121 ΙΙΙ 364 consid. 4b).
En l’occurrence, l’appelante a invoqué tant des motifs relatifs que des motifs absolus de hausse, indiquant que l’augmentation notifiée se justifiait par l’indexation pour 182 fr. et par les autres motifs mentionnés (travaux réalisés dans l’immeuble et l’appartement, loyers des appartements comparables loués dans l’immeuble et loyers selon statistiques cantonales), pour 168 fr., invoquant donc tant l’adaptation aux loyers usuels, que la hausse des coûts et des prestations supplémentaires du bailleur, ainsi que le maintien du pouvoir d’achat du capital exposé aux risques, soit des critères incompatibles entre eux.
Force est donc de constater que la hausse litigieuse ne peut être considérée comme motivée à satisfaction de droit puisqu’elle est fondée sur des motifs antinomiques ; sa nullité doit par conséquent être constatée (art. 269d al. 2 CO et 18 OBLF), indépendamment du fait que le niveau des loyers des baux récemment conclus dans le même immeuble ne constitue pas un critère pertinent.
La nullité pouvant être constatée en tout temps, il importe peu que les locataires n’aient pas contesté cette hausse dans les 30 jours suivant sa notification.

Decisione

50/5 - Contestation de hausse de loyer

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