Consignation de loyer

base giuridica

Nome del giudice

Chambre d'appel en matière de baux et loyers de Genève

Data

23.04.2001

Sommario

De manière générale, la prise en charge d‘un procès contre un tiers, dont un cas particulier d‘application est visé par l‘art. 259f CO, ne fonde pas le droit à une consignation de loyer dans la mesure où l‘issue du procès, à supposer qu‘elle puisse avoir pour conséquence d‘éliminer le défaut, échappe à la maîtrise du bailleur.

Esposizione dei fatti

Les parties sont liées par un contrat de bail à loyer portant sur la location d‘un appartement sis dans un immeuble situé à proximité de l‘ancien site des S.I.
Il est notoire que l‘association A. s‘est installée en juin 1996 sur ce site. Depuis 1996, les locataires de l‘immeuble se sont plaints des nuisances provenant des personnes qui gravitent autour des lieux du site et qui occasionnent, selon eux, de graves problèmes de bruit, de tapage nocturne, de musique jusqu‘à des heures avancées dans la nuit, de dégradation des environs de leur immeuble, de trafic de drogue.
Après une mise en demeure adressée à leur bailleresse le 11 novembre 1999 afin qu‘elle fasse le nécessaire pour éliminer les nuisances et leur accorde une réduction de loyer qui est restée sans suite, les locataires ont consigné dès le 1er décembre 1999 l‘intégralité de leur loyer à la Caisse du Palais de justice.
Le 23 décembre 1999, les locataires ont déposé devant la Commission de conciliation en matière de baux et loyers une requête en validation de consignation, élimination des nuisances et diminution de loyer.
Après l‘échec de la tentative de conciliation, la Commission a rendu, le 5 juillet 2000, une décision par laquelle elle a rejeté la requête en consignation de loyer déposée par les locataires, ordonné à la Caisse du Palais de justice de verser à la bailleresse la totalité des sommes consignées et accordé aux locataires une réduction de loyer de 10 % du 1er décembre 1999 jusqu‘à la suppression des nuisances.
La bailleresse, par acte du 11 août 2000, a interjeté recours contre ladite décision.

Considerazioni

3. La recourante fait valoir que les conditions matérielles de la consignation ne sont pas réunies de sorte que le Tribunal des baux et loyers aurait dû ordonner la restitution des loyers au bailleur. Elle invoque le caractère irréparable des défauts.
L‘art. 259g al. 1 CO relatif à la consignation du loyer exige, entre autres conditions, que la chose louée soit affectée d‘un défaut dont la réparation incombe au bailleur. Il est admis que le défaut de la chose louée peut avoir sa source dans le voisinage ou l‘attitude de tiers, par exemple le comportement des autres locataires, peu importe qu‘il échappe ou non à la sphère d‘influence du bailleur (SJ 1997 661). La condition liée à la réparation du défaut est plus complexe.
A l‘origine, la consignation a été voulue par le législateur comme un moyen de pression sur le bailleur pour "faire valoir plus efficacement ses prétentions en remises en état de la chose, en réduction du loyer et en dommages-intérêts" (FF 1985 I, Message p. 1418 ad 421.106). Les chambres fédérales ont toutefois remanié la disposition initiale (259f al. 1 CO) pour aboutir à l‘actuel art. 259g CO qui introduit comme conditions préalables à la consignation la fixation par écrit au bailleur d‘un délai raisonnable pour réparer le défaut ainsi que la menace de consigner le loyer si le défaut n‘était pas réparé dans le délai imparti. Le législateur a réduit par là le champ d‘application de la consignation à la seule prétention du locataire à la remise en état de la chose louée, à l‘exclusion des prétentions en réduction du loyer et en dommages-intérêts lorsque celles-ci sont seules litigieuses, dans le but d‘influencer et d‘accélérer les actions judiciaires (Wey, La consignation du loyer, étude des art. 259g-259i CO, Lausanne 1995, p. 73 no 285/286 et notes 241 et 242; Guhl/Kohler/Druey, Das schweizerische Obligationenrecht, p. 384; Higi, Commentaire zurichois, n. 9 ad art. 259g).
Après avoir laissé ouverte la question de savoir si le locataire était fondé à consigner le loyer lorsqu‘il ne demande pas la réparation du dommage, mais seulement des dommages-intérêts (ATF n.p. du 11.10.94, Pallini c/SI Glacifer SA), la jurisprudence du Tribunal fédéral semble y apporter implicitement une réponse négative en relevant, dans deux arrêts récents, que la consignation sert à la réalisation du droit à la réparation d‘un défaut et doit conférer au locataire un moyen de pression pour faire aboutir sa prétention en réparation (ATF 124 III 201 c. 2d, JT 1999 I 367/369; ATF 125 III 120, SJ 1999 p. 465 c. 2b).
La doctrine majoritaire estime encore que la consignation n‘est pas autorisée en diverses circonstances, en particulier lorsque le défaut est irréparable, soit lorsque le bailleur se trouve dans l‘impossibilité objective d‘y remédier parce que l‘élimination du défaut s‘avère impossible ou échappe à la sphère d‘influence du bailleur (Lachat, Le bail à loyer, 1997, p. 179 ad 7.3.3; Higi, Commentaire zurichois, n. 23 et 30 ad art. 259g CO; SVIT-Kommentar, Mietrecht, n. 4 et 8 ad art. 259g qui cite expressément le cas d‘immissions de bruit dues à la rénovation d‘un immeuble voisin; Züst, Die Mängelrechte des Mieters von Wohnungs- und Ge¬schäftsräumen, Berne, 1992 p. 285 no 479 et in mp 4/94 p. 176; Wey, op.cit. p. 73 no 286; Terrapon, Les défauts de la chose louée et la consignation du loyer, in 8e Séminaire sur le droit du bail, Neuchâtel 1994, p. 4; contra Weber/Zihlmann, Commentaire bâlois n. 4 ad art. 259g CO).
Récemment, la Chambre d‘appel en matière de baux et loyers à Genève, a retenu que "la consignation n‘est possible que lorsque la chose louée comporte un défaut dont l‘élimination incombe au bailleur" et a considéré sur cette base qu‘une consignation ne se justifiait pas pour des nuisances causées par une famille qui s‘était fait notifier un jugement d‘évacuation (ACJC 499 du 17.5.99, repris in DB no 12/2000 p. 18 no 9, solution approuvée par Pierre Wessner qui relève également comme autre cas d‘impossibilité objective celle du bailleur qui ne peut éliminer les nuisances excessives provenant d‘un grand chantier en construction sur un immeuble voisin).
Dans une autre décision, la Chambre d‘appel a effectivement considéré qu‘il n‘y avait pas matière à consignation du loyer en cas de nuisances inévitables liées à la construction d‘un immeuble voisin (ACJC 100 du 14.02.00 Institut B. SA c/ SI P.).
Il est constant que les nuisances alléguées proviennent de fonds voisins, propriété de tiers, en l‘occurrence l‘Etat et la Ville de Genève. La bailleresse n‘a dès lors aucune possibilité de réparation du défaut sur l‘immeuble, hormis les dispositions d‘isolation d‘ores et déjà prises, le défaut trouvant son origine en dehors de sa sphère de compétence.
Les locataires font valoir qu‘il incombe à la bailleresse d‘agir contre le tiers en application de l‘art. 259a al. 1 let. d CO.
De manière générale, la prise en charge d‘un procès contre un tiers, dont un cas particulier d‘application est visé par l‘art. 259f CO, ne fonde pas le droit à une consignation du loyer dans la mesure où l‘issue du procès, à supposer qu‘elle puisse avoir pour conséquence d‘éliminer le défaut, échappe à la maîtrise du bailleur.
De plus, les locataires réclament la suppression des nuisances, principalement nocturnes, provenant de tiers non identifiés dès lors qu‘ils précisent qu‘ils ne reprochent rien à A. en tant qu‘association.
Or, force est de constater que la bailleresse ne saurait agir contre des tiers non identifiés en cessation de trouble et qu‘une action civile de ce type à l‘encontre des propriétaires des fonds voisins, soit la Ville, respectivement l‘Etat de Genève, n‘aboutirait pas davantage à la suppression du trouble.
En réalité, les locataires attendent de la bailleresse qu‘elle fasse régner l‘ordre et la tranquillité publique, dont le respect incombe aux seules autorités compétentes, - sollicitées au demeurant dans ce sens tant par la bailleresse que par les locataires. Il n‘est pas concevable dans ce contexte de faire dépendre la consignation des loyers de l‘exercice ou non de la puissance publique qui n‘est pas du ressort de la bailleresse.
Les locataires n‘ont d‘ailleurs pas conclu de manière précise quant à l‘action en réparation du défaut, se bornant à requérir la condamnation de la bailleresse à prendre toutes mesures utiles et nécessaires à l‘élimination des nuisances, se gardant bien de définir quelles mesures propres la bailleresse peut entreprendre.
Il découle des considérants qui précèdent que la bailleresse a rendu vraisemblable que la réparation du défaut échappe à sa sphère de compétence de sorte qu‘il n‘y a pas matière à consigner les loyers.

Decisione

35/4 - Consignation de loyer

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