Augmentation de loyer dans un immeuble sortant du contrôle de l‘Etat

base giuridica

Nome del giudice

Chambre d'appel en matière de baux et loyers de Genève

Data

31.05.2002

Sommario

Le bailleur n‘est pas admis, après la sortie de l‘immeuble du contrôle cantonal des loyers, à motiver une augmentation de loyer par référence à des critères relevant du droit public cantonal, notamment à une clause relevant du bail à loyer. Les critères de hausse de loyer qui peuvent être invoqués alors sont ceux des art. 269 et 269a CO. Lorsque la hausse n‘est pas motivée ou ne l‘est pas suffisamment, la majoration du loyer est nulle, ce vice ne pouvant être réparé durant la procédure en validation de la hausse.

Esposizione dei fatti

Les parties sont liées par la conclusion d‘un contrat de bail à loyer portant sur la location d‘un appartement de 4 pièces à T., pour une durée d‘une année, du 1er novembre 1989 au 31 octobre 1990, renouvelable ensuite tacitement d‘année en année.
L‘article 11 des clauses particulières du bail du 26 juillet 1989 a la teneur suivante: "le loyer du logement en question est soumis au contrôle de l‘Office financier du logement. Il pourra être majoré, par palier tous les deux ans, jusqu‘à l‘échéance du contrôle de l‘Etat, soit après 10 ans, pour atteindre le loyer plafond de fr. 1‘190.- par mois".
L‘immeuble en question a été soumis au contrôle de l‘Etat jusqu‘au 31 décembre 1999.
Par un avis de majoration de loyer, la bailleresse a notifié au locataire que le loyer de l‘appartement qu‘il occupait était porté à fr. 1‘1190.- par mois, à partir du 1er janvier 2000. L‘avis de majoration mentionne, sous la rubrique "motif précis de la majoration: fin des prestations de l‘Etat et sortie du contrôle HLM au 31.12.1999. Application de l‘art. 11 du bail signé en date du 26 juillet 1989 stipulant officiellement le montant réel de votre loyer à l‘échéance du contrôle de l‘Etat."
Le locataire ayant contesté la majoration de loyer et la conciliation n‘ayant pas abouti, la bailleresse a introduit le 15 mai 2000 devant le Tribunal des baux et loyers une requête en validation de la hausse de loyer. Par jugement du 9 janvier 2001, le Tribunal des baux et loyers a débouté la demanderesse de ses conclusions.

Considerazioni

3. Les loyers de l‘immeuble en question étaient soumis au contrôle de l‘Etat jusqu‘au 31 décembre 1999, selon les modalités des articles 42 à 48 de la Loi générale sur le logement et la protection des locataires du 4 décembre 1977 (ci-après LGL) et ce, conformément à l‘article 5 al. 2 de la Loi générale sur les zones de développement du 29 juin 1957. Pendant toute la durée du contrôle, les demandes de modification de l‘état locatif agréé présentées par le propriétaire devaient être autorisées par le Service de surveillance des loyers de l‘Office financier du logement. Le loyer autorisé par ce service devait être notifié au locataire par la propriétaire sur la formule officielle ad hoc, mentionnant notamment les motifs de la modification du loyer (article 42 al. 7 LGL). Ces motifs sont ceux mentionnés à l‘article 42 al. 1 LGL, à savoir la diminution légale des prestations de l‘Etat et l‘évolution des conditions d‘exploitation de l‘immeuble, notamment les variations du taux des intérêts des dettes hypothécaires et le coût des travaux d‘entretien et de réparation. C‘est d‘ailleurs sur la formule officielle agréée par l‘autorité administrative que la bailleresse a notifié au locataire la majoration de loyer devant entrer en vigueur le 1er janvier 1998.
Les dispositions du Code des obligations relatives à la contestation des loyers abusifs ne s‘appliquent pas aux locaux d‘habitation en faveur desquels des mesures d‘encouragement ont été prises par les pouvoirs publics et dont le loyer est soumis au contrôle d‘une autorité (article 253b al. 3 CO).
Ainsi, les critères pouvant fonder une modification du loyer durant la période de contrôle ne sont pas ceux du Code des obligations. D‘ailleurs, la juridiction des baux et loyers n‘est pas compétente pour examiner un loyer contrôlé par l‘Etat et donc pour appliquer les critères de modification du loyer prévus par la législation cantonale de droit public. Cette compétence appartient à l‘autorité administrative.
Il découle de ce qui précède que le bailleur n‘est pas admis, après la sortie de l‘immeuble du contrôle cantonal des loyers, à motiver une augmentation de loyer par référence à des critères relevant du droit public cantonal.

4. Les critères de hausse de loyer qui peuvent être invoqués dans le cadre du droit privé fédéral, à savoir à la sortie du contrôle, sont ceux des articles 269 et 269a CO.
En principe, pour majorer unilatéralement le loyer, le bailleur ne devrait invoquer que des critères relatifs, et le juge appliquer la méthode relative. Exceptionnellement, la jurisprudence admet que le bailleur se prévale d‘un facteur absolu et que le juge applique la méthode absolue pour examiner une majoration unilatérale du loyer. La sortie d‘un immeuble du contrôle cantonal des loyers constitue précisément l‘une des exceptions à ce principe, justifiée, d‘une part, par le fait que les dispositions relatives à la contestation des loyers abusifs ne s‘appliquent pas aux locaux d‘habitation dont le loyer est soumis au contrôle d‘une autorité et, d‘autre part, parce que les modalités spécifiques auxquelles obéit la fixation du loyer par l‘autorité administrative compétente ne sont pas de nature à éveiller chez le locataire la confiance, propre à la méthode relative, quant au caractère suffisant du dernier loyer payé par lui (ATF 123 III 171, considérant 6a).
Il s‘ensuit que le bailleur peut, à la sortie du contrôle, invoquer le critère absolu du rendement net de l‘article 269 CO et alléguer que le loyer ne lui permet pas d‘obtenir un rendement suffisant.

5. La question du caractère impératif de l‘article 269a CO et celle de savoir si l‘article 11 du contrat de bail peut être considéré valablement comme instituant un motif de hausse de loyer dérogeant à cette disposition légale peuvent demeurer ouvertes. En effet, il est manifeste qu‘aucune des hypothèses prévues par la disposition conventionnelle n‘est réalisée. En particulier, la majoration contestée est intervenue après la sortie du contrôle de l‘Etat.

6. En toute hypothèse, la formule officielle destinée à communiquer au locataire la hausse de loyer doit contenir les motifs précis de la hausse (art. 269d CO, art. 19 al. 1 lit. a ch. 4 OBLF).
En l‘espèce, la bailleresse a motivé l‘augmentation devant entrer en vigueur le 1er janvier 2000, par référence à l‘article 11 du contrat de bail, et plus particulièrement au loyer maximum autorisé par l‘Office financier du logement. Comme on l‘a vu, cette motivation en tant que telle ne peut être retenue, puisque la disposition contractuelle en question réglait la majoration "jusqu‘à l‘échéance du contrôle de l‘Etat".

7. Il est vrai que la motivation indiquée dans l‘avis de majoration constitue une manifestation de volonté du bailleur, soit un acte juridique unilatéral qui se manifeste sous la forme d‘un droit formateur. Ainsi, la détermination de son sens et de sa portée s‘effectue conformément aux principes généraux en matière d‘interprétation des manifestations de volonté, ce qui vaut également pour l‘exigence de clarté. Si les parties ne sont pas d‘accord sur le sens à donner aux motifs figurant dans l‘avis formel de majoration, il y a lieu d‘interpréter ceux-ci selon le principe de la confiance. On examinera d‘après les facultés de compréhension du locataire et au vu de toutes les circonstances du cas particulier si les motifs donnés sont suffisamment clairs et précis pour que l‘intéressé puisse décider en toute connaissance de cause s‘il veut s‘opposer ou non aux nouvelles clauses contractuelles (ATF 121 III 6, considérant 3c).
En l‘occurrence, le locataire ne pouvait pas, de bonne foi, comprendre que la bailleresse, en faisant référence à l‘article 11 du contrat de bail, entendait en réalité se fonder sur l‘article 269 CO et soutenir que le loyer ne lui procurait pas un rendement suffisant. La bailleresse aurait dû mentionner expressément le critère du rendement net dans l‘avis de majoration de loyer. La simple référence à une clause contractuelle adoptée par les parties lorsque l‘immeuble était soumis au contrôle cantonal des loyers est insuffisante.
Lorsque la hausse n‘est pas motivée ou qu‘elle ne l‘est pas suffisamment, comme en l‘espèce, la majoration du loyer est nulle (article 269d al. 2 lit. b CO). Ce vice ne peut pas être réparé durant la procédure en validation de la hausse. Ainsi, c‘est à juste titre que le Tribunal a considéré que le calcul de rendement présenté par la bailleresse ne pouvait être retenu, car tardif.

Decisione

37/5 - Augmentation de loyer dans un immeuble sortant du contrôle de l‘Etat

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