Restitution de la chose louée de colocataires
Base légale
- Art. 70 al. 2 CO
- Art. 267 al. 1 CO
Nom du tribunal
Chambre d'appel en matière de baux et loyers de Genève
Date
12.05.2003
Résumé
La restitution de la chose louée est une obligation indivisible, chaque colocataire étant consort nécessaire dans l'obligation de restituer la chose, le comportement de l'un ne libérant pas les autres. Il découle de ce principe d'indivisibilité de la restitution de la chose louée que si une décision judiciaire prononce l'évacuation d'époux, celle-ci doit être consacrée par un seul jugement contre les deux époux. Il en découle que la suspension sollicitée à l'égard de l'épouse doit avoir effet à l'égard de son époux également.
Exposé des faits
Les parties sont liées par un contrat de bail du 24 mars 1995 portant sur un appartement de quatre pièces, sis à O.
Le
17 août 2000, les époux locataires ont reçu une lettre du bailleur au
sujet de plaintes des locataires concernant leur comportement. Le 17
octobre 2000, le bailleur a résilié le bail pour le 30 novembre 2000
pour violation du devoir de diligence et manque d'égards envers les
voisins.
Le 17 novembre 2000, les époux locataires ont contesté le
congé et ses motifs devant la Commission de conciliation en matière de
baux et loyers. Le 7 mars 2001, le bailleur a requis de la Commission
précitée l'évacuation des locataires de leur logement.
Le 11 février
2002, le Tribunal de première instance a été saisi d'une requête de
mesures protectrices de l'union conjugale. Le tribunal a autorisé, le 20
juin 2002, les époux à vivre séparés, attribué la jouissance de
l'appartement conjugal au conjoint et a ordonné à son épouse d'évacuer
le logement d'ici au 30 septembre 2002.
Sur requête de son conjoint,
le Tribunal tutélaire a prononcé l'interdiction de l'épouse le 20
décembre 2002 et a confié la tutelle au Tuteur général.
Le 4 octobre
2002, le Tribunal des baux et loyers a déclaré valable la résiliation de
bail du 17 octobre 2000 pour le 30 novembre 2000 et a condamné les
époux à évacuer l'appartement. L'époux a interjeté appel de ce jugement.
Considérations
5. Toutefois, la restitution de la chose louée (art. 267 al. 1 CO) est
une obligation indivisible, chaque colocataire étant consort nécessaire
dans l'obligation de restituer la chose, le comportement de l'un deux ne
libérant pas les autres (art. 70 al. 2 CO); Jacquemoud-Rossari,
Jouissance et titularité du bail ou quelques questions choisies en
rapport avec le bail commun, CdB 4/99, p. 101 et 103; Micheli, Les
colocataires dans le bail commun, Séminaire sur le droit du bail,
Neuchâtel, 1994, p. 15; Thévenaz, La prétendue solidarité des
colocataires lorsque la chose louée n'est pas restituée à l'échéance du
bail, JdT 2001 I 376 et les références citées).
Il découle de ce
principe d'indivisibilité de la restitution de la chose louée que si la
Chambre d'appel prononce l'évacuation des époux G., celle-ci doit être
consacrée par un seul jugement contre les deux époux. Il en découle que
la suspension sollicitée à l'égard de S. G. doit avoir effet à l'égard
de son époux également.
En effet:
- il n'est pas établi que l'appelant a quitté l'appartement litigieux,
- l'attribution
du logement à l'appelant par le juge des mesures protectrices de
l'union conjugale n'a pas de valeur face au bailleur (Micheli, op.cit.,
p. 18-19),
- le comportement de son épouse expose l'appelant à la
résiliation du bail, chaque colocataire étant responsable envers le
bailleur du comportement des autres colocataires, contraire aux
obligations découlant du bail, telles que les égards dus aux voisins et
aux habitants de la maison (Micheli, op. cit., p. 10-11).
6. La
suspension de l'instance doit être relevée d'office par le juge
(Bertossa/Gaillard/Guyet/Schmidt, Commentaire de la loi de procédure
civile genevoise, n. 3 ad art. 113 LPC).
L'instance est suspendue en
cas d'interdiction au sens des art. 369 et ss CC, l'interdiction ayant
été prononcée en l'espèce sur la base de l'art. 370 CC (art. 113 lettre d
LPC; Bertossa/Gaillard/Guyet/Schmidt, op. cit., n. 3 ad art. 113 LPC).
Dès
la survenance de la cause de suspension, les délais sont suspendus et
aucun acte d'instruction ne peut être accompli (art. 115 al. 1 LPC). Les
procédés postérieurs sont nuls (art. 115 al. 2 LPC).
La date de la
publication de l'interdiction de S. G. est en l'espèce inconnue. Avant
sa publication, l'interdiction est opposable aux tiers, dès qu'ils en
ont eu connaissance (Deschenaux/Steinauer, Personnes physiques et
tutelle, 2001, n 905 p. 353). La date du 14 janvier 2003 sera retenue
comme date de la cause de suspension, soit la date de la réception de la
lettre du conseil de l'appelant à la Chambre d'appel et au conseil de
l'intimé indiquant que S. G. avait été interdite par ordonnance du
Tribunal tutélaire du 20 décembre 2002.
Décision
38/6 - Restitution de la chose louée de colocataires