Résiliation d’un accessoire au bail à loyer
Base légale
Nom du tribunal
Chambre d’appel en matière de baux et loyers de Genève
Date
07.04.2008
Résumé
Le bailleur n’est pas obligé de résilier le bail de l’objet principal et celui de l’accessoire pour pouvoir récupérer ce dernier. Le congé donné par le bailleur pour récupérer uniquement l’accessoire est efficace, mais il peut être annulé s’il s’avère contraire à la bonne foi ou que le locataire peut obtenir une prolongation judiciaire de la convention par laquelle il a obtenu l’usage de cet accessoire.
Exposé des faits
Les parties sont liées par un contrat de bail à loyer portant sur la
location d’un studio à G.. Le 5 mai 1983, le bailleur a également remis à
bail au locataire une place de parking ; ce contrat a été conclu pour
une durée initiale de sept mois, commençant le 1er juin 1983 et se
terminant le 31 décembre 1983 ; ultérieurement, le contrat s’est
renouvelé tacitement de six mois en six mois, aucune partie en l’ayant
résilié en respectant le préavis minimum de trois mois.
Le 16 mars
2006, le bailleur a résilié le bail de la place de parking du locataire
pour le 30 novembre 2006, sans donner d’explication. En date du 7 avril
2006, le locataire a saisi la Commission de conciliation en matière de
baux et loyers d’une requête en constatation de l’inefficacité du congé,
en annulation de ce congé et subsidiairement en prolongation de son
bail. Il a soutenu que le bail de l’accessoire ne pouvait être résilié
qu’avec le bail principal.
En date du 16 octobre 2006, la Commission
de conciliation en matière de baux et loyers a rendu une décision selon
laquelle elle a annulé le congé notifié le 16 mars 2006 en retenant
qu’il revenait au bailleur de résilier les deux baux le liant au
locataire s’il voulait obtenir la restitution de la place de parking.
En
date du 21 novembre 2006, le bailleur a saisi le Tribunal des baux et
loyers d’une requête en contestation de la décision précitée de la
Commission de conciliation en matière de baux et loyers.
Par acte du
26 octobre 2007, le locataire a interjeté appel contre le jugement du
Tribunal des baux et loyers rendu le 24 septembre 2007 qui a déclaré
valable le congé qui lui a été notifié le 16 mars 2006 portant sur la
place de parking.
Considérations
2. En premier lieu, G. R. prétend que le congé litigieux doit être
déclaré inefficace, en reprenant l’argumentation qu’il a développée
selon laquelle le contrat de bail portant sur un accessoire ne peut être
résilié qu’avec celui qui porte sur l’objet principal. A l’appui de
cette thèse, l’appelant se réfère à l’arrêt rendu le 18 juin 2004 par la
Chambre d’appel de céans en la cause A. c/ F. (ACJ no 815/2004).
Or,
dans l’arrêt précité, la Chambre d’appel de céans a retenu que le
critère déterminant pour que l’accessoire suive le sort du principal est
celui de l’interdépendance : le locataire n’a loué les dépendances que
parce qu’il a loué ou veut louer le local principal. Peu importe que
l’accessoire soit mentionné dans le bail, que les parties aient signé
deux contrats ou que les baux aient été conclus simultanément ou non. En
revanche, les deux parties au contrat doivent être les mêmes, étant
précisé qu’il peut être admis que l’on confonde deux bailleurs
économiquement liés. Ainsi une résiliation portant uniquement sur
l’accessoire est annulable.
Cette jurisprudence s’inscrivait dans le
prolongement d’un arrêt rendu par le Tribunal fédéral antérieurement,
selon lequel une place de stationnement louée à proximité d’un logement,
pour permettre au locataire d’y parquer sa voiture lorsqu’il se rend
chez lui, constitue une chose dont l’usage est cédé avec l’habitation au
sens de l’art. 253a al. 1 CO, pour autant que le contrat soit conclu
entre les mêmes parties. Il importe peu que le bail de la place de
stationnement et celui du logement soient convenus en même temps. Il
s’ensuit que les dispositions concernant les baux d’habitation et de
locaux commerciaux s’appliquent dans ce cas, notamment celles des art.
269 ss et 271 ss CO (SJ 1999 p. 373 = JT 2000 I 194 = ATF 125 III 231 ;
ACJ no 1060 du 6.11.2000 M. c/C.).
Les parties à la présente cause
admettent que le bail de la place de parking de l’appelant constitue
bien un accessoire du contrat de location portant sur son logement.
Cependant,
la Chambre d’appel de céans doit observer que l’appelant se trompe
lorsqu’il en tire la conclusion que les jurisprudences sus-rappelées
impliqueraient que le bailleur soit obligé de résilier le bail de
l’objet principal et celui de l’accessoire pour pouvoir récupérer ce
dernier ou, encore, qu’il devrait proposer une modification du contrat
en lui notifiant, à cet effet, une formule officielle idoine.
En
effet, les principes jurisprudentiels sus-rappelés ne font que confirmer
la teneur de l’art. 253a al. 1 CO et, dès lors, l’applicabilité au bail
portant sur l’accessoire, des dispositions relatives à protéger les
locataires contre les loyers et autres prétentions abusifs des bailleurs
ou les congés contraires à la bonne foi. Ces protections ne sont, en
effet, pas applicables lorsque l’objet loué, qui n’est ni une
habitation, ni un local commercial, n’est pas remis à bail au locataire
en tant qu’accessoire d’un logement ou d’un local destiné à des
activités.
Au contraire, les jurisprudences mentionnées ci-dessus
précisent-elles que le congé donné par le bailleur pour récupérer
l’accessoire est efficace, mais qu’il peut être annulé s’il s’avère
contraire à la bonne foi ou que le locataire peut obtenir, le cas
échéant, une prolongation judiciaire de la convention par laquelle il a
obtenu l’usage de cet accessoire.
Au demeurant, la thèse selon
laquelle le bailleur qui souhaiterait récupérer l’usage de l’accessoire
devrait nécessairement dénoncer simultanément le bail portant sur
l’objet principal doit manifestement être écartée, dans la mesure où
elle est susceptible d’aboutir, ainsi que l’ont relevé les juges de la
Commission de conciliation en matière de baux et loyers, à une situation
absurde.
En effet, cette thèse revient à admettre que le bailleur
puisse résilier le contrat portant sur le logement de son locataire
uniquement pour récupérer la place de parking que ce dernier lui loue
également. Or, un tel congé consacrerait une « disproportion manifeste
des intérêts en présence » qui serait caractéristique d’un congé donné
de mauvaise foi (pour l’objet principal) ce qui entraînerait
l’annulation des deux congés donnés par le bailleur et, enfin de compte,
l’impossibilité pour ce dernier d’obtenir la restitution de sa place de
parc.
Enfin, il convient de relever que les deux contrats distincts
de bail à loyer qui lient les parties ne comportent aucune clause ayant
pour effet de les relier entre eux. Ils possèdent en revanche des
périodes de renouvellement distinctes, ce qui montre que les parties ont
admis qu’ils pouvaient être résiliés à des périodes différentes, ce qui
est le signe d’une autonomie de chacun des contrats.
Dans ces conditions, le congé litigieux n’est pas inefficace.
Décision
45/1 - Résiliation d’un accessoire au bail à loyer