Délai de contestation du loyer initial
Base légale
Nom du tribunal
Chambre d'appel en matière de baux et loyers de Genève
Date
26.05.2003
Résumé
Le choix du bailleur d'adresser au locataire l'avis de fixation du loyer initial exempt de signature avant la signature du bail ne saurait lui permettre d'invoquer la tardiveté de la contestation du locataire, si celle-ci est effectuée dans les trente jours dès la notification de cet avis postérieurement à la signature du bail.
Exposé des faits
Les parties sont liées par un contrat de bail à loyer du 30 août 2000,
portant sur la location d'un appartement de deux pièces et demie à G.,
dont le loyer a été fixé à fr. 810.-, sans les charges.
Dans le
courant du mois de juillet 2000, la bailleresse a fait parvenir au
locataire le contrat de bail accompagné d'un avis de fixation du loyer
initial. Ces documents n'étaient pas signés par le bailleur.
Au début du mois d'août, le locataire est entré en possession de l'appartement faisant l'objet de la location.
Par
avis sans signature du 14 août 2000, la bailleresse a sollicité du
locataire qu'il lui retourne le second exemplaire du contrat de bail
ainsi que l'avis de fixation du loyer pour que ces documents puissent
être signés par le bailleur.
Les documents précités ont été signés par le bailleur en date du 30 août et adressés au locataire le lendemain.
Par
courrier du 30 septembre 2000 adressé à la Commission de conciliation
en matière de baux à loyers, le locataire a déclaré contester le loyer
initial de l'appartement qu'il occupe.
Par acte déposé au greffe de
la Cour le 7 juin 2002, la bailleresse appelle du jugement rendu par le
Tribunal des baux et loyers le 7 mai 2002 déclarant recevable la requête
en contestation du loyer initial formée par le locataire.
Considérations
2. Lorsque le locataire estime que le montant du loyer initial est
abusif au sens des articles 269 et 269a CO, il peut le contester devant
l'autorité de conciliation dans les 30 jours qui suivent la réception de
la chose et en demander la diminution s'il a été contraint de conclure
le bail en raison de la situation sur le marché local du logement ou des
locaux commerciaux (art. 270 al. 1 lit. a CO).
En cas de pénurie de
logements, les cantons peuvent rendre obligatoire, sur tout ou partie de
leur territoire, l'usage de la formule officielle mentionnée à
l'article 269d pour la conclusion de tout nouveau bail (art. 270 al. 2
CO).
Le canton de Genève a fait usage de cette possibilité, étant
précisé que la formule officielle doit être notifiée au plus tard le
jour de la remise de la chose louée au locataire (art. 24 al. 3 LACC).
Il
est également admis que la formule de fixation du loyer initial doit
être notifiée au plus tard dans les 30 jours qui suivent la délivrance
de la chose louée. Si la notification respecte ce dernier délai, le
locataire peut saisir l'autorité de conciliation dans les 30 jours qui
suivent la réception de la notification, même si cette date est
postérieure à la remise des locaux (Lachat, le bail à loyer, p. 264).
En dérogation à l'art. 270 al. 1 CO, la jurisprudence a admis cette façon de procéder (ATF 121 III 56).
Le
formulaire doit être dûment rempli; le bailleur ne saurait se contenter
d'envoyer un formulaire vierge, en annexe d'un courrier explicatif. Le
formulaire officiel, ou à tout le moins la lettre d'accompagnement, doit
être signé (art. 13 al. 1 CO; Lachat, le bail à loyer, p. 265).
En
l'espèce toutefois, un avis de fixation du loyer initial non signé a été
porté à connaissance du locataire avant la remise des locaux et plus
d'un mois avant la conclusion du bail, puisque le locataire en a eu un
exemplaire entre les mains dès la fin du mois de juillet 2000.
Néanmoins,
depuis le milieu du mois d'août 2000, soit lorsqu'il a retourné à la
régie le second avis de fixation du loyer pas encore signé par la régie,
et jusqu'à la notification par celle-ci de cet avis le 1er septembre
2000, U.P. ne disposait pas de ce document. Il convient donc de
déterminer quand a débuté le délai prévu à l'art. 270 CO pour contester
le loyer initial.
La Cour estime que l'on ne saurait prétendre que le
délai susmentionné a commencé à courir dès l'envoi de l'avis de
fixation du loyer initial non signé au mois de juillet 2000 ou à compter
de l'entrée en possession des locaux par U.P. Dans le cas contraire,
cela reviendrait à contraindre le locataire à contester son loyer
initial sans avoir la certitude que le contrat de bail qu'il a lui-même
signé le soit également par le bailleur.
Le choix du bailleur
d'adresser au locataire l'avis de fixation du loyer initial exempt de
signature avant la signature du bail ne saurait lui permettre d'invoquer
la tardiveté de la contestation d'U.P., si celle-ci a été effectuée
dans les 30 jours dès la notification de cet avis postérieurement à la
signature du bail comme c'est le cas en l'espèce.
Le bailleur n'a pas
prouvé pour le surplus que l'avis de fixation du loyer initial qui a
été adressé au locataire en juillet 2000, a été accompagné d'une lettre
signée.
Attendre que le bailleur fasse parvenir au locataire l'avis
précité et le bail dûment signés pour faire débuter le délai prévu à
l'art. 270 al. 1 CO n'apparaît aucunement abusif bien au contraire.
En
contestant le loyer initial par pli du 30 septembre 2000, U.P. a agi
dans le délai utile prévu par la jurisprudence en application de l'art.
270 al. 1 CO.
On ne saurait en outre retenir à la charge du locataire
un comportement contraire à la bonne foi au sens de l'art. 2 al. 2 CC,
lorsqu'il a agi dans le délai de 30 jours à partir duquel le bailleur
lui a notifié l'avis de fixation du loyer initial signé par lui-même et
fait parvenir un exemplaire du bail signé par les deux parties. En
conséquence, le jugement querellé sera confirmé.
Décision
38/9 - Délai de contestation du loyer initial