Contestation de loyer initial
Base légale
Nom du tribunal
Chambre d’appel en matière de baux et loyers de Genève
Date
22.06.2007
Résumé
Lorsqu’il examine le caractère abusif ou non du loyer initial, le juge ne peut pas retenir une limite inférieure au loyer fixé avec le précédent locataire. Il n’est en effet pas exclu que le loyer convenu avec celui-ci était déjà abusif, ou fixé en fonction de circonstances propres au précédent locataire.
Exposé des faits
Les parties sont liées par un bail portant sur un appartement de 3,5
pièces situé à G.; le loyer annuel a été fixé à fr. 10'560.-, charges
non comprises, réputé adapté à l’indice suisse des prix à la
consommation. Il a pris effet le 1er septembre 2005, la première
échéance étant arrêtée au 31 août 2010.
L’avis de fixation du loyer
initial mentionne que le précédent loyer avait été fixé à fr. 8'316.- le
1er janvier 2004. Quant au nouveau loyer, l’avis stipule qu’il se fonde
sur l’art. 269a lit. a CO, partant qu’il se situe dans les limites des
loyers usuels dans la localité ou dans le quartier.
Les locataires
ont saisi la Commission de conciliation d’une requête en contestation du
loyer initial le 26 septembre 2005, déclarée non conciliée le 16
décembre 2005 et introduite le 19 décembre suivant devant le Tribunal.
Les locataires ont conclu à ce que le loyer soit fixé à fr. 6’700.- dès
le 1er septembre 2005.
Par jugement rendu le 23 août 2006, le
Tribunal des baux et loyers a fixé le loyer annuel initial à fr.
10'560.-, charges non comprises. Les locataires ont fait appel de ce
jugement.
Considérations
3. 3.1 Lorsque le locataire estime que le montant du loyer initial est
abusif au sens des art. 269 et 269a CO, il peut le contester devant
l'autorité de conciliation dans les trente jours qui suivent la
réception de la chose et en demander la diminution s'il a été contraint
de conclure le bail par nécessité personnelle ou familiale ou en raison
de la situation sur le marché local du logement ou des locaux
commerciaux (art. 270 al. 1 let. a CO). Selon la jurisprudence, une
telle situation de contrainte existe lorsque le gouvernement cantonal,
sur la base d'une étude statistique sérieuse, a pris un arrêté
constatant une pénurie dans la catégorie de logements correspondant à
celui en cause (SJ 2002 I 589). Selon le dernier arrêté du Conseil
d'Etat du 20 décembre 2006, la pénurie sévit dans toutes les catégories
d'appartement d'une à sept pièces ou plus (I 4 45.07). La requête en
contestation du loyer initial est également recevable lorsque le
bailleur a sensiblement augmenté le loyer initial pour la même chose par
rapport au précédent loyer.
3.2 Dans le cadre de cette procédure, le
juge doit se fonder sur toutes les circonstances du cas, soit notamment
sur le montant admissible selon l'art. 269 CO, et les loyers non
abusifs pratiqués dans le quartier. Il doit également se montrer
attentif à ne pas placer le bailleur irrespectueux de ses obligations
légales dans une position plus favorable que le bailleur de bonne foi
(ATF 120 II 341 consid.6).
Lorsqu'il examine le caractère abusif ou
non du loyer initial, le juge ne peut pas retenir une limite inférieure
correspondant au loyer fixé avec le précédent locataire. Selon les
circonstances, il n'est en effet pas exclu que le loyer convenu avec
celui-ci était déjà abusif, ou fixé en fonction de circonstances propres
au précédent locataire, notamment lorsque ce dernier avait les moyens
de payer un loyer que le calcul de rendement ne justifierait pas ou
encore parce que le locataire avait d'autres rapports de droit avec le
bailleur qui l'a amené à négliger la recherche du juste prix de son
logement (arrêt du Tribunal fédéral du 17 novembre 2006, 4C. 281/2006).
La reprise du loyer précédent n'apparaît pas plus justifiée lorsque la
prestation du bailleur a changé de manière significative, par exemple en
cas de rénovation de l'objet du bail ou lorsque l'ancien loyer avait
été fixé particulièrement bas pour des raisons liées à la parenté, à un
contrat de travail ou à des considérations sociales (ATF 120 II 350).
Cela
étant, le pouvoir d'examen du juge n'est pas aussi étendu que dans la
procédure en contestation d'un loyer fixé en violation des formes
prescrites, puisqu'il doit limiter son examen au caractère abusif ou non
du loyer convenu par les parties ( SJ 1995 p. 246, ATF 120 II 341 et
ss).
En principe, le loyer initial se détermine selon la méthode
absolue et non par rapport à un loyer payé antérieurement par un tiers,
le but de l'art. 270 CO n'étant pas de vérifier si une éventuelle
augmentation par rapport à l'ancien loyer est abusive, mais si le loyer
en tant que tel excède la norme, afin d'éviter qu'un abus ne se perpétue
au-delà du changement de locataire (Arrêt du Tribunal fédéral
4C.281/2006, consid. 2.2; Cahiers du bail 2/06 p. 64). Le bailleur est
toutefois libre de motiver la hausse du loyer par des critères relatifs,
auquel cas le juge ne saurait examiner l'admissibilité du loyer initial
à la lumière d'autres critères, en particulier des critères absolus, à
moins que le locataire ne réclame, de son côté, un tel examen, lequel ne
peut pas lui être refusé (ATF 121 III 364 consid. 4b).
Décision
44/5 - Contestation de loyer initial