Contestation de hausse de loyer - Demande de diminution de loyer
Base légale
- Art. 269 CO
- Art. 269a CO
- Art. 270 CO
Nom du tribunal
Chambre d'appel en matière de baux et loyers de Genève
Date
08.12.2003
Résumé
Dans les deux situations qui lui étaient soumises, le Tribunal pouvait procéder par le biais de la méthode absolue, qui détermine le rendement possible de la chose louée. Toutefois, il a appliqué la méthode absolue pour la sortie de régime HLM et la méthode relative pour la demande de baisse. Le fait de procéder ainsi à deux calculs différents pour une même cause crée une insécurité juridique inacceptable, partant arbitraire.
Exposé des faits
Les parties sont liées par un contrat de bail à loyer du 6 février 1997
portant sur la location d'un appartement de six pièces à G. dont le
loyer annuel a été fixé à fr. 23'388.- dès le 1er juillet 1997.
Entre
juillet 1981 et décembre 2001, l'immeuble a été soumis au régime HLM.
Le 11 janvier 2002, la bailleresse a fait notifier un avis de majoration
aux locataires fixant le loyer annuel de leur appartement à fr.
27'588.-, sans les charges, dès le 1er avril 2002. Cet avis était ainsi
motivé: "Augmentation conforme à l'art. 269 CO, ainsi qu'aux articles 1
et ss de l'OBLF du 9 mai 1990. Sortie du régime HLM."
La hausse de
loyer a été contestée par écritures du 11 février 2002 devant la
Commission de conciliation en matière de baux et loyers. Non conciliée,
l'affaire a été portée devant le Tribunal des baux et loyers.
Dans
ses conclusions, la bailleresse, après avoir procédé à un calcul de
rendement, a conclu principalement à ce que le Tribunal fixe le loyer
annuel de l'appartement à fr. 27'432.-, charges non comprises, dès le
1er avril 2002 et déboute les locataires de leurs conclusions
reconventionnelles en baisse de loyer.
Par jugement du Tribunal des
baux et loyers du 16 avril 2003, le Tribunal a fixé le loyer annuel de
l'appartement à fr. 24'240.- dès le 1er avril 2002, charges non
comprises, puis à fr. 23'952.- dès le 1er juillet 2002, charges non
comprises. La bailleresse a interjeté appel de ce jugement.
Considérations
3. Selon l'art. 270a CO, le locataire peut contester le montant du loyer
et en demander la diminution pour le prochain terme de résiliation,
s'il a une raison d'admettre que la chose louée procure au bailleur un
rendement excessif au sens des art. 269 et 269a CO, à cause d'une
notable modification des bases de calcul, résultant en particulier d'une
baisse des frais.
La jurisprudence relative aux hausses de loyer s'applique mutatis mutandis aux demandes de baisses du locataire.
Les
critères déterminants pour examiner une demande de baisse de loyer
sont, d'une part, ceux existants lors de la dernière fixation de loyer
et, d'autre part, ceux connus à la date à laquelle l'actuelle demande de
baisse devait, au plus tard, être communiquée au bailleur, notamment
par remise à la poste, et qui ont pris effet au plus tard au terme de
résiliation (ATF 122 II 20, JdT 1996 I 600, consid. 4b, p. 602).
En
général, lorsque le locataire demande une baisse de loyer, en se fondant
sur un facteur relatif, le bailleur peut d'abord lui opposer un autre
facteur relatif (Lachat, Le bail à loyer, Lausanne 1997, ch. 5.4.2. p.
361 et 7.1 p. 363); il peut aussi lui opposer le rendement insuffisant
de la chose louée (ATF 116 II 73; Jdt 1991 I 299) ou les loyers du
quartier (ATF 122 III 257 rés. in SJ 1996 p. 542), les critères absolus
ayant alors une fonction défensive au profit du bailleur. Dans cette
hypothèse, la méthode absolue sert de correctif à la méthode relative
(Lachat, op.cit., ch. 5.4.2 p. 361; ATF 121 III 163; ATF non publié du 3
mai 1999 rés. in SJ 1999 I p. 379).
3.1 L'art. 270b CO permet au
locataire de contester une hausse de loyer qu'il estime abusive s'il a
une raison d'admettre que la chose louée procure au bailleur un
rendement excessif au sens des art. 269 et 269a CO.
Lorsque le loyer
sort d'une période de contrôle de l'Etat, la jurisprudence a admis que
les parties pouvaient fonder leurs prétentions sur la méthode absolue
(ATF 123 III p. 173).
3.2 Il résulte de la présente procédure que
le Tribunal a d'abord procédé à un calcul de rendement, en considérant
la situation du marché et de l'immeuble au 31 décembre 2001. Il a donc
arrêté le loyer dû dès le 1er avril 2002 en appliquant la méthode
absolue. Celle-ci impliquait la prise en compte d'un taux hypothécaire
de 4 % pour le rendement des fonds propres. Les calculs effectués par le
Tribunal n'ont pas été critiqués et la solution retenue pour la
fixation du loyer admissible en sortie de régime est admise. Procédant
ensuite à un calcul selon la méthode relative, sans se référer aux
considérations développées pour fixer le loyer admissible, le Tribunal a
posé que l'évolution des taux hypothécaires, des charges d'exploitation
et du renchérissement autorisaient une baisse de loyer de 1,16 % qu'il a
appliquée au loyer admissible qu'il venait de fixer dès le 1er avril
2002.
L'appelante affirme que, ce faisant, le Tribunal a admis la
demande reconventionnelle de manière arbitraire, en se basant sur le
taux hypothécaire de 1997 au lieu de celui qui prévalait en février
2002, inchangé par rapport au taux qui avait servi de base pour le
calcul de rendement.
3.3 Dans les deux situations qui lui étaient
soumises, le Tribunal pouvait procéder par le biais de la méthode
absolue, qui détermine le rendement possible de la chose louée.
Toutefois, il a appliqué la méthode absolue pour la sortie de régime et
la méthode relative pour la demande de baisse. Le fait de procéder ainsi
à deux calculs différents pour une même cause crée une insécurité
juridique inacceptable, partant arbitraire. Par ailleurs, il ne saurait
être question, une fois un loyer fixé à partir d'une certaine date selon
la méthode absolue, de remettre aussitôt en cause ce calcul en
reconsidérant la même période selon la méthode relative, qui précisément
a été écartée dans le calcul de rendement, pour en déduire d'autres
conséquences. Si le bailleur demande qu'il soit fait application de la
méthode absolue, le locataire ne peut pas lui opposer la méthode
relative (Lachat, op. cit., ch. 5.1.5. p. 357); c'est pourtant ce qui a
été fait en l'espèce.
Décision
39/8 - Contestation de hausse de loyer - Demande de diminution de loyer