Chambre des baux et loyers de la Cour de justice du canton de Genève
14.04.2014
Selon la LDTR, le bailleur qui a l’intention d’exécuter des travaux importants doit aviser le locataire de son projet et des conséquences de la modification de loyer qui en résulte. En cas de non-respect de cette obligation, le Département peut refuser la délivrance de l’autorisation requise. Ainsi, le non-respect de cette obligation n’a pas d’effets de droit privé et ne rend pas le congé donné au locataire illicite.
La mère du locataire était locataire depuis 1971 d’un appartement de 5,5
pièces à C. Elle est décédée le 28 janvier 2010. Le 28 janvier 2010, le
locataire a informé la bailleresse qu’il occupait l’appartement avec sa fille.
Il sollicitait un rafraîchissement des murs et plafonds de l’ensemble de
l’appartement.
Une visite de l’appartement a eu lieu le 27 avril 2010. Le 6
août 2010, la bailleresse a déposé une demande d’autorisation de construire pour
la rénovation complète de l’appartement en cause. Par courrier du 25 août 2010,
le Département concerné a demandé à la bailleresse de lui transmettre copie de
l’information au locataire prévue par l’art. 43 LDTR.
Par avis de résiliation
du 20 septembre 2010, la bailleresse a résilié le bail du locataire pour le 31
décembre 2010, précisant que « après examen il est impératif de procéder à une
rénovation complète de l’appartement. Au vu de l’ampleur et de la durée des
travaux, la bailleresse doit se résoudre à résilier le bail, de manière à
pouvoir effectuer les travaux en question ». Le 22 mars 2011, le département a
délivré l’autorisation de rénover l’appartement.
Saisi d’une requête en
contestation du congé du locataire, la Commission de conciliation a rendu une
décision le 26 janvier 2012 par laquelle elle déclarait le congé valable et
accordait au locataire une première prolongation de bail au 30 juin 2013.
Le
29 février 2012, le locataire a saisi le Tribunal des baux et loyers. Par
jugement du 21 mars 2013, ledit Tribunal a annulé le congé notifié le 20
septembre, les premiers juges considérant notamment que la bailleresse, dans le
cadre de la procédure d’autorisation de construire relative aux travaux de
rénovation, n’avait pas respecté un certain nombre de dispositions de la Loi sur
les démolitions, transformations et rénovations de maisons d’habitation (LDTR).
La bailleresse a formé appel contre ce jugement en temps utile.
4.1 Dans son jugement entrepris, le Tribunal des baux et loyers a également
retenu que le congé était illicite au motif que la bailleresse n’avait pas
respecté l’art. 43 al. 1 LDTR, qui prévoit l’obligation du propriétaire
d’informer au préalable et par écrit les locataires et de les consulter en
dehors de toute résiliation de bail lorsqu’il a l’intention de réaliser les
travaux. Il en a déduit que le congé était, de ce fait, annulable.
La
recourante conteste que la violation de l’art. 43 al. 1 LDTR entraîne
l’illicéité du congé. De son côté, le locataire soutient que le congé
contrevient à l’art. 43 al. 1 LDTR et qu’il doit ainsi être considéré comme nul,
en application de l’art. 20 CO. L’art. 43 LDTR a la teneur suivante:
1.
Le propriétaire a l’obligation d’informer au préalable et par écrit les
locataires et de les consulter en dehors de toute résiliation de bail, lorsqu’il
a l’intention d’exécuter des travaux au sens de la présente loi. Il leur expose
son projet et les informe de la modification de loyer qui en résulte. Il leur
impartit un délai de 30 jours au moins pour présenter leurs observations et
suggestions éventuelles.
2. Le Département veille que le propriétaire
informe par écrit, individuellement, les locataires de la liste des travaux
autorisés et du programme d’exécution de ces travaux.
3. En cas de
non-respect de l’obligation d’information et de consultation prévues à l’alinéa
1 du présent article, le Département peut refuser la délivrance de
l’autorisation requise. L’art. 44 de la présente loi (Sanctions et mesures) est
réservé.
Il découle par ailleurs de l’art. 6 du règlement d’application de la
LDTR (RLDTR – L5 20.01) que l’information au locataire doit avoir lieu avant le
dépôt de la demande d’autorisation de construire.
Le but poursuivi par ce
régime est de permettre aux locataires qui vivent dans les lieux d’apporter
leurs observations sur ledit projet et d’exposer dans la procédure les
conséquences qu’il entraîne sur leur situation personnelle (ATA/605/2008 du 2
décembre 2008).
La conséquence du non-respect de cette obligation est que le
Département peut refuser la délivrance de l’autorisation requise (art. 43 al. 3
LDTR). La LDTR ne prévoit nullement que le congé donné par le bailleur dans ce
contexte serait affecté d’un vice. Un tel congé n’est toutefois pas sans
conséquence. Il peut amener le Département à refuser l’autorisation de
construire.
4.2 Ainsi, dans le cas d’espèce, le non-respect de l’art. 43
LDTR n’a pas d’effets de droit privé et ne rend pas le congé donné à l’intimé
illicite. Il aurait en revanche pu permettre au Département de refuser
l’autorisation sollicitée. Le Département n’a pas souhaité appliquer cette
sanction, considérant que le but poursuivi, soit de permettre à l’intimé de se
prononcer sur le programme des travaux, avait été atteint.
Par conséquent
c’est à tort que le Tribunal des baux et loyers admis que le congé devait être
annulé au motif de la violation de l’art 43 al. 1 LDTR.